CES MÈRES QUI MALTRAITENT LEUR ENFANT (2)

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Il y a dix ans paraissait sous la plume de Sarah Blaffer Hrdy, anthropologue, 600 pages intitulées «  »(Payot). Parce qu’on doit à la France, à travers les thèses de Simone de Beauvoir et Elisabeth Badinter, l’hypothèse de la « mère socialement construite », la chercheuse démolit cette doctrine, en répliquant que chez tous les primates, l’investissement maternel émerge à la suite d’une sorte de réaction en chaine, « interactions complexes entre gènes, tissus, glandes, expériences passées et signes de l’environnement. Les comportements complexes comme le maternage ne sont jamais totalement prédéterminés génétiquement ni produits par le seul environnement.» Les travaux de Sarah Hrdy n’opposent pas inné et acquis, nature et culture. Ils montrent que l’instinct maternel n’est pas une pulsion sommaire indestructible, mais qu’il se met en place si l’environnement n’est pas défavorable.

Et pourtant…

Et pourtant, chaque jour, je reçois des appels d’hommes, de femmes, d’adolescents en souffrance. Qui ne comprennent pas pourquoi, ou qui ne comprennent que trop.
« Ma mère ne m’aime pas ».

Un constat des plus terribles et des plus douloureux. Car il touche ce qu’il y a d’essentiel dans la construction de l’enfant, puis de l’adulte : le fait d’assouvir un besoin primaire, celui d’être reconnu, désiré et aimé.
Ces mères qui n’aiment pas ou ne savent pas aimer sont bien plus nombreuses que la société bien pensante veut l’admettre. Encore aujourd’hui il est de bon ton de reconnaître, de comprendre et parfois même d’excuser un père trop « sévère », un père « abandonnique », un père qui fuit sa famille, ses enfants et ses responsabilités. « Mais une mère, elle, ne le ferait pas. »
Une mère ne le ferait pas, et encore moins une maman.

Deux notions distinctes, mère/maman, deux notions qu’il faut pour autant prendre en considération et auxquelles il est essentiel de donner la même importance.
Et c’est souvent sur ces deux notions que je reviens en consultation.
La maman, celle qui soigne, dorlote, nourrit, console, câline et protège.
La mère, celle qui éduque, contrôle, donne un cadre, pose des limites, assure la confiance et la reconnaissance, et permet de développer une conscience familiale et sociale.

Parfois l’on se sent plus mère que maman, ou plus maman que mère. Parfois, l’on reconnaît en celle qui nous a mis au monde un côté plus maman, ou plus mère.
Parfois, on ne reconnaît rien de cela, si ce n’est d’avoir vécu de la maltraitance, du dénigrement, du rejet, de la violence.
Quand Hervé Bazin écrit Vipère au Poing, quand Jules Renard rédige Poil de Carotte, quand Melanie Klein étudie les conséquences sur l’enfant du comportement de la « mauvaise mère », ou encore quand Terri Apter consacre un essai aux « « , ce ne peut que tendre à montrer qu’une mère n’est pas toujours une bonne mère. (Et ne sont cités ici que quelques auteurs, la liste des ouvrages pourrait être bien plus longue).

« Tu veux ma mort… Tu es ma pire ennemie… »
À l’approche de la cinquantaine, xxx m’interroge : « Qu’ais-je fait pour que ma mère me parle comme ça ? »
Rien.
Tout.
Vous êtes venue au monde. Vous êtes le miroir de SES échecs. De SES erreurs et de SES freins. Elle vous déteste car elle s’est elle-même empêchée d’être. Mais pour pouvoir supporter sa propre vie, elle a rejeté sa colère et sa rancoeur sur vous. Et vous en subissez chaque jour les conséquences, cherchant depuis votre naissance à comprendre comment plaire à cette mère qui ne vous donne aucun amour.

« Tu peux te casser à 10.000 kilomètres, je m’en fous… »
xxx a 15 ans. Elle se scarifie. Elle est anorexique. Elle est traitée pour dépression. Elle ne vit plus avec sa mère. Pourtant, elle la guette, elle la quête, elle cherche constamment comment lui plaire. Elle ne peut pas se résoudre à dire quoi que ce soit qui serait entendu comme « contre » sa mère.
Parce qu’il n’est pas normal qu’une mère n’aime pas son enfant…

« Elle me prenait contre elle quand il y avait du monde à la maison, elle m’obligeait à appuyer ma tête contre épaule, et elle me faisait des sourires et exigeait que je l’embrasse. Mais sans qu’on le voit, elle me pinçait le bras jusqu’au sang. Si je n’avais pas été comme elle voulait, elle me privait de dîner, le soir ; elle me laissait seule dans ma chambre, dans le noir, et je l’entendais rire avec mes frères. »
xxx a 37 ans. Elle n’a eu aucune relation amoureuse, aucune histoire, avec personne. Elle pense ne pas y avoir droit. Elle ne sait pas ce que c’est que l’amour. Elle n’en a pas reçu. Elle redoute de faire mal, à son tour.

« Elle est morte il y a deux ans. C’était ma soeur. Elle avait 21 ans. Ma mère ne lui a jamais parlé ; elle la sifflait. Quand papa a quitté la maison, elle lui a dit : Tiens, prends ton chien, en donnant un coup de pied à ma soeur. »
xxx n’a jamais été maltraité par sa mère. Il sait qu’il était le fils aimé, prodigue. Qu’il avait droit à tout, pouvait tout. Sa soeur n’était rien pour leur mère, si ce n’est l’objet du scandale (née avant le mariage) et l’obstacle à une vie plus légère (la mère avait été contrainte d’épouser celui dont elle attendait un enfant).

« J’ai eu un enfant, tard, à 38 ans. Avant, je n’en voulais pas. Je ne voulais pas être comme ma génitrice. Je ne voulais pas risquer de blesser, de frapper, de détruire. J’ai eu une fille. Et je ne sais pas si je fais bien avec elle. J’ai tellement peur… »
xxx se méfie d’elle-même, de chacun de ses mots, de ses gestes, avec son enfant. Elle grandit avec sa fille. Elle apprend à sourire, à donner, à aimer. Elle s’émerveille. À 40 ans, elle découvre la vie, l’amour, ce qu’est d’être maman, ce qu’est d’être enfant.

Non, toutes les mères ne sont pas bonnes. Toutes les mères ne sont pas bienveillantes. Toutes les mères n’aiment pas. Certaines frappent, humilient, rejettent, dénigrent, critiquent. Privent leur enfant de ce qui est essentiel.
Et s’il est parfois possible de comprendre pourquoi elles sont ainsi, si certains enfants, devenus adultes, peuvent finir par accepter, c’est avant tout aux enfants qu’il faut penser, pour les protéger,  et les aider à se reconstruire, plutôt que de chercher à excuser leurs mères, à tout prix.

Let me tell you why you’re here. You’re here because you know something. What you know you can’t explain, but you feel it. You’ve felt it your entire life, that there’s something wrong with the world. You don’t know what it is, but its there, like a splinter in your mind, driving you mad.

Morpheus ~ The Matrix

Un témoignage, en anglais, à lire :
« Her narcissism helps her survive. If it were to be destroyed by my version of events, it would undermine her self-esteem, her very sense of self and the context of her existence. She would also go mad. As it is, she can continue to believe that she was the perfect mother and all the issues are on my side. She’s over 70 now and I think it’s best. But I’m not doing it for her. I don’t do that anymore. I’m doing it for me. Because the day I called it quits, was the day I started to live the life I wanted instead of trying and always failing, to be the daughter she wanted. It’s the day I realised that I was safer living without the love of my mother and better off loving myself. »
Louisa Leontadies

Et toujours en anglais, deux livres à découvrir :

 

 

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©Anne-Laure Buffet

LES TROUBLES PSYCHIQUES SPÉCIFIQUES LIÉS AUX TRAUMATISMES

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Côtoyer, ou avoir côtoyé, une personnalité toxique, comporte de nombreuses conséquences, dont des conséquences psychologiques. Stress, dépendance, manque de confiance en soi, troubles (du sommeil, de l’humeur, de l’alimentation)…
Les conséquences sont physiques et psychiques.

Ces troubles sont liés à des mécanismes de sauvegarde exceptionnels, psychologiques et neurobiologiques, déclenchés lors du stress extrême et du risque vital que génère le traumatisme, ces mécanismes sont responsables d’ une déconnexion du circuit de réponse au stress entraînant une mémoire traumatique, une dissociation avec anesthésie affective et physique.
Ces troubles psychotraumatiques :

  • vont être à l’origine des conséquences les plus graves, les plus fréquentes des violences sexuelles.
  • vont être à l’origine d’un état de souffrance permanent.
  • vont transformer la vie des victimes en «un enfer», «un état de guerre permanente», «sans espoir de s’en sortir».
    Ce sont des conséquences normales de situations anormales

1) Les troubles psychiques spécifiques se répartissent en :

  • état de stress aigu, détresse, avec ou sans une dissociation péritraumatique, troubles psychotiques brefs, jusqu’à 1 mois après le traumatismes.
  • état de stress post-traumatique (>1 mois), chronique (>6 mois), différé, avec la triade pathognomonique : syndrome de reviviscence, syndrome d’évitement, hyper-réactivité neurovégétative :
    1. syndrome de reviviscence = mémoire traumatique : pensées récurrentes sur les violences, ruminations, souvenirs intrusifs de tout ou partie de l’événement ( sensations douleurs, bruits, paroles ), agissements soudains comme si l’événement allait se reproduire, flash-back, illusions, rêves répétitifs, cauchemars, vécus intensément avec une forte angoisse et détresse, l’accouchement peut être une situation de réactivation des réminiscences.
    2. syndrome d’évitement : évitement phobique de toutes situations se rapportant au traumatisme ou pouvant rappeler l’événement, évitement de la pensée, développement d’un monde imaginaire ; évitement de toute situation douloureuse ou stressante, émoussement des affects, désinvestissement des relations interpersonnelles, perte de l’anticipation positive de l’avenir.
    3. syndrome d’hypéractivité neuro-végétative : hypervigilance, état d’alerte et de contrôle, sursaut, insomnie, réveils nocturnes, hypersensibilité, irritabilité, colères explosives, troubles de la concentration et de l’attention.
  • symptômes de dissociation souvent importants : état de conscience altérée, troubles de la mémoire, de la concentration, de l’attention, sentiments d’étrangeté, d’être spectateur de sa vie, dépersonnalisation, compagnon imaginaire.
  • état de stress post-traumatique complexe : proposé pour décrire les conséquences chez des victimes de violences interpersonnelles répétées sur une longue durée (Trauma de type II de Terr). Il est défini par plusieurs critères, dont certains font aussi partie de la personnalité limite :
    1. une altération de la régulation des émotions avec une impulsivité marquée et des comportements auto-destructeurs.
    2. des perturbations de l’attention ou de la conscience, pouvant entraîner des épisodes dissociatifs.
    3. une altération de la perception de soi, avec des sentiments permanents de honte ou de culpabilité, et un sentiment de vide.
    4. une altération de la perception de l’agresseur, qui peut être par exemple idéalisé.
    5. des relations interpersonnelles perturbées, avec une incapacité à faire confiance ou à avoir une relation intime avec autrui.
    6. des symptômes de somatisation.
    7. des altérations cognitives avec une perte d’espoir.

2) Les troubles psychiques associés, souvent sur le devant de la scène

Ce sont des :

  • troubles de l’humeur : présents dans 50% des ESPT (état de stress post-traumatique), dépression, épisodes maniaco-dépressifs.
  • troubles anxieux : anxiété généralisée , crises d’angoisse, attaque de panique, phobies, agoraphobie, phobies sociale, troubles obsessionnels compulsif.
  • troubles de la personnalité : personnalité limite (border-line), asociale.
  • troubles du comportement auto agressif : tentatives de suicide (x10 en cas d’ESPT par rapport à la population générale), automutilation.
  • troubles addictifs : consommation de drogues , d’alcool, jeux (alcool chez 52 % des hommes et 28 % des femmes et de consommation d’autres substances psychoactives chez 35 % des hommes et 27 % des femmes).
  • troubles des conduites : conduites à risques, fugues, conduites d’hypersexualité, marginalisation, conduites violentes.
  • troubles du comportement alimentaire : boulimie, anorexie.
  • troubles du sommeil : narcolepsie (somnanbulisme, hallucinations narcoleptiques, paralysies du sommeil, cataplexie, hypersomnolence diurne)
  • troubles de la sexualité.

3) Les troubles psychotraumatiques spécifiques chez l’enfant de moins de 6 ans

Les symptômes sur le devant de la scène sont :

  • un changement brutal de comportement avec des pleurs et une grande tristesse, un état d’agitation avec une hyperactivité, accompagné d’agressivité et d’opposition ou au contraire une prostation avec un désintérêt pour le jeu, des phobies d’apparition brutale
  • une anxiété de séparation avec refus de se séparer d’adultes protecteurs, de rester seul et de dormir seul dans leur chambre, d’aller chez la nourrice, à la crèche, à la garderie ou à l’école
  • des troubles de l’alimentation et du sommeil (terreurs nocturnes, cauchemars)
  • des comportements, des jeux et des dessins répétitifs et compulsifs reproduisant les violences
  • un comportement régressif : balancements, sucer son pouce à longueur de journée; avec perte d’acquis dans le développement et dans l’autonomie : marche, propreté (énurésie, encoprésie), langage
  • des troubles somatiques avec des douleurs abdominales, des céphalées, des nausées, des vomissements

4) Les troubles psychotraumatiques spécifiques chez l’enfant de plus de 6 ans

Les symptômes sur le devant de la scène sont :

  • des difficultés scolaires, des troubles de l’apprentissages, de la concentration
  • des troubles dissociatifs, avec troubles de la vigilance, absences, vie imaginaire très importante, compagnon imaginaire avec qui l’enfant communique, anesthésie affective, sentiment d’étrangeté particulièrement par rapport à son propre corps
  • des troubles de l’alimentation : anorexie, boulimie, prise de poids
  • des symptômes neuro-végétatifs : troubles du sommeil (difficultés à aller au lit, cauchemars, réveils nocturnes, somnambulisme), irritabilité, colères, hypervigilance,
  • des troubles du comportement : hyperactivité, comportement agressif, opposition, retrait, mise en danger, fugues, violences
  • des troubles anxieux et dépressifs fréquents : idées obsédantes, peurs spécifiques liés au traumatisme, peur du noir, peur d’objet, peur d’aller seul aux toilettes, attaques de panique

5) Les troubles psychotraumatiques spécifiques chez l’adolescent

Les symptômes sur le devant de la scène sont :

  • des difficultés scolaires, échec scolaire, absentéismes
  • des troubles relationnels, retrait et phobie sociale, difficultés relationnelles, irritabilité, colères
  • des conduites à risques dissociantes ++ : mises en danger, sports extrêmes, jeux dangereux (risque d’accidents très important), auto-mutilations, conduites addictives (tabac, alcool, drogue), fugues, sexualité à risque, violences envers autrui, agressivité, délinquance
  • des troubles dissociatifs avec troubles de la vigilance, vie imaginaire très importante, anesthésie affective, sentiment d’étrangeté particulièrement par rapport à son propre corps
  • des troubles de l’alimentation (anorexie, boulimie) et du sommeil
  • des troubles anxieux et dépressifs avec des tentatives de suicide

AU SECOURS DOCTEUR !

« Peut-on soigner un pervers narcissique ? » La question revient souvent…
Il serait tellement plus agréable de pouvoir répondre : « Oui. Une pilule matin et soir, et le tour est joué. » Mais ça ne fonctionne pas ainsi. Pour soigner un malade, pour aider une personne qui souffre d’une pathologie – quelle que soit la pathologie – il faut que cette personne l’accepte.
Le problème, c’est que le pervers narcissique refusant de considérer qu’il est malade, les thérapies n’ont pas de prise sur lui.

S’il accepte de s’y soumettre, pour pouvoir dire qu’il a fait « tous les efforts possibles », pour pouvoir argumenter auprès de son entourage « qu’une fois de plus il se soumet à des caprices, en espérant que la situation s’améliore ensuite », il va vite considérer le thérapeute comme nul et incompétent et la thérapie comme totalement inutile.

Il arrive également – et c’est encore plus pernicieux – qu’il retourne le thérapeute contre celui ou celle déjà victime. La « proie », qui pendant un temps a pu se sentir rassurée, soulagée, se disant qu’elle allait, enfin ! , être entendue, se retrouve non seulement à devoir supporter de nouvelles réprimandes et autres brimades, mais à devoir assumer le regard méfiant du thérapeute, certes prêt à l’aider, mais complètement abusé par une personnalité toxique.
Et le PN gagne deux fois : il ne sera pas suivi ; il passe à nouveau pour victime, lorsqu’il est le bourreau.

Le refus de se considérer comme malade pousse encore plus loin le PN.
Non seulement il ne suivra aucun conseil de thérapeute, non seulement il pourra retourner la situation contre sa victime, mais plus encore, il s’instruira du jugement du psychiatre/psychologue… rencontré, apprendra de lui les mots et les termes utiles pour mieux les resservir en plats chauds, et trois, à sa victime, lorsqu’il aura choisi de lui faire un peu plus mal. De lui dire à nouveau que c’est elle, la folle. De faire en sorte qu’elle se croit malade.

COUPÉ EN DEUX – TÉMOIGNAGE

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Il y a deux jours, je postais cet article : « COUPÉ EN DEUX« .
Le sujet de cet article est la déchirure, le conflit interne, la lente destruction mentale, que vit un enfant emporté dans la tourmente d’un conflit entre ses deux parents – un parent manipulateur et un parent victime. Conflit dont il devient l’objet sans le vouloir et sans pouvoir s’y opposer.
Certains enfants tombent alors dans un piège encore plus fort : le SAP, notion fortement contestée (comme le montre cet article de décembre 2012 publié sur Mediapart) mais bien réelle, quelle que soit le nom qu’on lui donne.

Suite à l’article « Coupé en deux », plusieurs commentaires, sur le blog ou par mail, dont celui ci-dessous.

Et qui confirme la nécessité de protéger les victimes, et les enfants. Car, SAP, ou nom qu’on veut lui donner, ils n’en sortent jamais indemnes.

Remarquable description du conflit de loyauté (dans le meilleur des cas), pouvant trop facilement mener au SAP – malheureusement – lorsqu’un des parent est PN.

J’ai eu la chance immense de tomber sur une JAF qui partageait cette intelligence avec Salomon. Elle a très vite compris où était l’intérêt des enfants.
Depuis, je ne dis pas que la vie est cependant facile. Malgré le SAP développé par ma fille, je crois encore qu’elle s’en sortira. En tout cas la fratrie l’aidera lorsqu’elle sortira de l’emprise et réalisera le gouffre où elle se débat aujourd’hui. C’est mon énergie qui s’investit dans ce combat aux accents amers et frustrants. Ses frères sont horrifiés autant par les nombreuses attitudes et leurs suites que par le fait qu’elle utilise la boîte à outils de sa mère, de leur mère.
Je crois que dans leur liberté, ils gardent toute latitude et se forment peu à peu leur propre jugement. C’est là que se trouve leur issue. Le chemin de la liberté passe par leur rapport à la responsabilité. En plein SAP, ma fille rejette toute responsabilité. Je pense que ce critère est essentiel, car en refusant d’assumer quoi que ce soit elle joue le jeu du parent PN, telle une munition dans l’arme du prédateur impuissant et morbide.

C’EST PAS MOI, C’EST L’AUTRE

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La perversion narcissique est une déviance, et non une pathologie.

Ainsi que le dit Jean-Charles Bouchoux en parlant du pervers narcissique, « il ne connaît ni souffrance, ni remords. Il n’est pas malade. Rapidement, c’est son entourage qui devient malade ». Le narcissisme est censé apaiser et protéger le pervers. Il développe une tendance à la mythomanie et à la paranoïa, un pouvoir de conviction et un acharnement s’apparentant au jusqu’au-boutisme.
Il se présente comme victime, martyr de la personne que, justement, il cherche à éliminer. Et l’élimination est sur toutes les scènes, sociale, personnelle, familiale, professionnelle…

Sa confusion entre lui et l’autre lui fait incorporer les qualités qu’il peut trouver chez l’autre. Son « soi » grandiose est conforté ; son « moi » déstructuré compense ses faiblesses. Son arme principale ? La séduction.

Il est porteur d’un poison inodore, incolore. Il n’en est même pas conscient ; il se dédouane par projection sur l’autre. Échappant ainsi à toute souffrance, il ne se remet pas en question. En revanche, il cherche en permanence chez « l’autre », considéré comme ennemi, les causes de son malaise – mal-être. « L’autre » devient son miroir. Le PN y voit son reflet qu’il veut détruire ; et en cherchant à le détruire, il détruit « l’autre ».
« Le pervers, par ses actes, sème une confusion telle que sa victime, bien souvent, ne peut plus agir intelligemment. Injonctions paradoxales, agressions violentes, dévalorisation puis séduction ne permettent plus à la victime de pouvoir réagir sainement. La paradoxalité est telle que la victime ne sait plus si elle doit croire ce que lui indiquent ses sens, ce qu’elle voit ou ce qu’elle entend. Toute logique devient caduque. »

Le pervers narcissique pratique la confusion des limites entre soi et l’autre. Il incorpore les qualités de l’autre, les attribue à son soi grandiose, pour pallier à sa faiblesse du Moi. Ces qualités appropriées, il les dénie à leur véritable possesseur. La séduction est un aspect crucial de cette stratégie. (Hubert Houdoy). Le PN s’appuie sur l’instinct protecteur qui lui est proposé. Il incorpore, pour mieux détruire.

Il utilise tous les stratagèmes possibles pour atteindre son objectif, quitte à déployer une énergie démesurée, à transgresser les terres de sa victime, à spolier ses jardins secrets, à semer les graines de la discorde, de la suspicion dans son entourage, à pratiquer la politique de la terre brûlée, pour sortir indemne et victorieux. (Martiale O’Brien)