Tout va bien. Vous voilà débarrassé(e) de votre « PN », votre compagnon ou compagne toxique, depuis un certain temps. Vous avez pris conscience de l’emprise et de la soumission. Vous l’avez analysée. Vous avez vaincu la honte. Vous avez confiance en vous. Vous ne courbez plus l’échine.
Vous êtes un nouvel homme, une nouvelle femme.
Et vous en parlez. Vous ne vous apitoyez pas sur votre sort. Vous ne souhaitez pas être plaint(e). Vous témoignez, puis passez à autre chose.
Un soir, au cours d’un dîner, chez vous. Vous avez passé du temps à organiser ce dîner. Vous êtes fier(e) de vous, et vous pensez cette fierté méritée. Vos invités arrivent. Vous passez à table. Vous apportez pompeusement le plat préparé avec amour. On vous demande du sel. Du sel… le plat n’est pas assez salé. Vous avez raté l’assaisonnement. Vous tressaillez. Serez-vous toujours bon à rien, à ne pas même savoir préparer un plat ? Vous n’entendez pas la fin de la discussion. Vous focalisez sur votre plat. Votre soirée est gâchée.
Un après-midi, en famille. Deux d’entre eux veulent jouer aux échecs. Vous regardez le début de la partie. Et l’un dit en souriant : « Tiens, tu t’intéresses à ça, toi, maintenant ? Pourtant tu ne comprends jamais rien aux jeux… ». Et ça a toujours été ainsi. Vous n’êtes pas curieux(se). Vous n’êtes pas capable. Vous ne progresserez jamais.
En vacances, à la plage. Il fait beau, et chaud. Vous vous assoupissez quelques instants. Votre enfant revient, en pleurant. Il a reçu un coup de pelle de la part d’un autre enfant, il pleure, il a le nez qui coule, il a eu peur. Vous n’avez rien vu. Vous n’avez pas réagi. Vous vous préoccupez de consoler votre petite tête blonde. Mais le coupable déjà loin, dans le giron de ses propres parents, ne sera pas puni. Et vous vous rappelez que vous n’avez pas de caractère, que vous n’êtes bon(ne) qu’à vous taire, que vous ne savez même pas protéger vos enfants, qu’à cause de vous, ils courent des dangers. Vous vous en voulez. Votre progéniture aura droit à une double ration de glaces. Et vous, un double somnifère, pour oublier l’incident.
Tout cela est – malheureusement – très banal.
Les victimes de personnalités toxiques ont des réminiscences, longtemps après. Le fait le plus anodin, la parole la plus légère, peut réveiller chez elles des peurs, des angoisses, des traumatismes qui semblent depuis longtemps effacés ou guéris. Elles n’ont pas (que) une fragilité à fleur de peau. Elles n’ont pas (toujours) une hypersensibilité. Elles ont été éduquées ainsi. Comme les victimes de lavages de cerveau, d’attentats, comme certains cas d’hypnose exagérés par le cinéma ou les séries populaires, elles sont conditionnées, elles ont des comportements-réflexes. Elles ne peuvent pas les contrôler, même si elles ont compris ces conditionnements et en partie accepté de ne pas être responsables.
Le savoir permet non pas de s’en prémunir, mais de l’analyser lorsqu’une telle situation se produit. L’analyser retire l’affect de la situation, ne lui conservant que son aspect théorique, concret. il n’est alors pas question de dissociation, mais de prise de recul. Il n’y a pas de honte à ressentir. Il n’y a pas non plus à se dire « Ce n’est pas ma faute ».
Pour progresser, il faut surtout penser : « C’est ainsi. Ça peut m’arriver encore. Mais ce n’est rien qu’un détail. Le reste de ma vie, l’essentiel de ma vie, c’est maintenant moi, et moi seul(e), qui la dirige. »
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