NOUVEAU TÉMOIGNAGE

Les noms sont supprimés de ce témoignage afin de préserver l’anonymat de celui, ou celle (…) qui me l’a adressé. 

 

Notre fille vient de m’appeler au secours car tu refuses de t’intéresser à sa scolarité musicale et de lui acheter les cordes nécessaires à son instrument.
A l’inverse de ce que tu lui déclares, sa scolarité est de ta responsabilité cela est indéniable :
1°- Tu l’as inscrite au Conservatoire;
2°- Tu perçois pour nos enfants une pension d’éducation et tu en as la domiciliation;
3°- Le fait que j’assume seul l’achat de son instrument te fait économiser 300€ par an. Tu trouveras bien 100€ pour remplacer les cordes qu’il est nécessaire de remplacer et même avoir des cordes de rechange.
Evidemment si tu te dépassée et incapable d’assumer la domiciliation de nos enfants et ses obligations, il te suffit d’aller voir un JAF pour le mentionner. J’assumerai, dans l’intérêt de nos enfants, au quotidien mon rôle de père, comme je le réclame depuis toujours.

MORT VIVANTE – EXTRAIT 2 – À PARAÎTRE

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Je ne dois pas parler.
De toute façon, lorsque je parle, je me trompe à chaque fois.

Je lui fais honte.

Quand nous ne sommes pas seuls, il guette chacun de mes mots. Je le sais. Je vois le coin de son oeil loucher vers moi ; je le vois faire ce rictus qui veut tant dire, qui veut tout dire… « Surtout, tais-toi. Ça va t’éviter de raconter n’importe quoi. J’en ai assez de corriger tes gaffes. »

On s’adresse à moi. Il se fige, il se crispe, qu’il soit en train de parler à un autre, ou de se taire. Les secondes suivantes sont lourdes, comme du plomb qui se mettrait à couler dans mes veines. Je n’ose plus répondre, je n’ai pas de réponse, je bafouille, je bredouille. J’hésite. Je tremble. Je transpire. L’affreuse sueur qui coule par petites gouttes de ma nuque à mon dos. Mes aisselles se tâchent, l’auréole doit être visible de tous.

Son regard est insistant. « Ne dis rien, surtout, ne dis rien, tu sais bien que tu ne sais pas… ». Il n’a pas prononcé un son, mais les mots explosent devant mes yeux, comme un ordre. Comme un défi.
« Si tu parles, tu vas te ridiculiser. Ce n’est rien, tu es déjà ridicule. Tu vas me ridiculiser, également. Tu ne ferais pas ça, n’est-ce pas ? Tu ne ridiculiserais pas ton mari ? Ce serait stupide. Cruel. Dangereux. »

Pas besoin qu’il me parle. Je sais ce qu’il pense. Je sais ce qu’il veut hurler, mais qu’il retient, dans un sourire qu’il adresse à tous.

– Je ne sais pas.

Je devine le soupir qui glisse entre ses lèvres entrouvertes. Elle s’est tue. Elle passe pour une ignorante, pour une bécasse, il est bien à plaindre. Mais il préfère être plaint, à devoir supporter cette idiote, qu’être plaint de devoir rattraper une énième erreur.

Je ne fais que des erreurs.
Je ne sais pas.
Quand je parle, les mots se mélangent, les phrases n’ont plus de sens.
Je reste assise, là. Mon verre à la main. Un verre pas plus, un verre seulement, pour m’autoriser à me tenir bien. Un verre, sinon, que penserait-on ?
Je reste là.
Je le regarde parler.

Ne pas lui nuire. Ne rien faire, ne rien dire, contre lui.
J’ai de la chance. Il est brillant. Il parle pour moi, et même s’il ne dit pas ce que moi j’aurais dit, même s’il me prête des pensées que je n’ai pas, il me l’a montré. Lui sait s’exprimer.
J’ai de la chance. Et je m’en veux de ne pas être à sa hauteur.
Sans doute parce que je suis idiote.

Alors, je me tais.

©Anne-Laure Buffet