Témoignage reçu cet après-midi à l’association.
Si vous voulez transmettre le votre :
« J’ai longtemps pensé que j’étais malade. Je ne comprenais rien , jamais. Il me demandait sans cesse des choses, je le faisais pour le satisfaire, je me donnais du mal. J’ai changé de vêtements, de coupe de cheveux, d’habitudes alimentaires. Il était – officiellement – végétarien. Il m’avait imposé de l’être, pour ma santé, moi qui suis carnivore. J’ai découvert longtemps après qu’il se nourrissait de steaks et d’entrecôtes dès qu’il avait un déjeuner d’affaires, c’est-à-dire tous les jours. Il m’a payé mes études, mais il les a choisies pour moi, critiquant ce que j’aimais, critiquant mes parents qui le laissaient faire. J’ai arrêté le piano et la peinture quand les enfants sont nés, je n’avais plus de temps. Quand il s’énervait, je ne disais rien, je suppliais les enfants de se taire, je les grondais souvent, en leur disant qu’ils pourraient faire attention, que leur père était fatigué. Il a acheté une voiture, pour moi. C’était une occasion. Je ne savais pas qu’elle n’avait pas été vérifiée. J’étais contente. La voiture n’avait pas de frein. J’ai eu un accident. Il a dit que je conduisais mal. J’ai failli mourir. Il est venu à l’hôpital me dire que je détruisais ses cadeaux, que je lui coutais cher. C’est l’expertise du véhicule qui a dit que les freins étaient morts – ça aurait pu être moi. Le garagiste a dit qu’il avait prévenu mon mari. Il y a eu enquête quand j’ai déposé plainte. Mais il y a eu un non lieu, je ne pouvais pas prouver que je ne savais pas que la voiture était en mauvais état.
Il ne m’a pas parlé pendant plusieurs mois. Il me tuait des yeux, il me crachait dessus dès que nous étions seuls. Mais il disait aux enfants que j’étais folle, malade, dangereuse. Que j’avais voulu faire croire à une tentative de meurtre, en me mettant en danger. Mon fils aîné m’a dit que j’étais un monstre. Je ne pouvais toujours pas marcher. J’étais dans un fauteuil toute la journée, et toute seule. Si j’avais besoin d’aller aux toilettes, il n’y avait personne. Souvent, je me suis salie. Le soir, il me laissait sale, dans mon fauteuil, me disant que même les chiens savent ne pas faire sur eux. Une infirmière venait le matin. Elle n’a jamais rien dit. J’ai su plusieurs mois après qu’il l’avait embauchée… sans la déclarer. Elle n’avait pas de papiers. Elle avait peur.
Folle, oui, sans doute. Folle de ne pas avoir réagi. J’avais peur, mais j’aurais du prendre sur moi.
Une fois j’ai réagi.
J’ai appelé un avocat. J’ai trouvé son nom dans l’annuaire. Mon mari l’a su. Je ne sais pas comment. Peut-être, la facture de téléphone, il surveillait tout. Il m’a menacée. Si je faisais quoi que ce soit, si je disais quoi que ce soit, il dirait à tout le monde que je suis folle. Il me ferait enfermer. Je ne verrais plus jamais enfants.
Il m’a obligée à appeler l’avocat devant lui, à dire que je ne ferai rien, que tout s’arrangeait. J’ai cédé. J’avais peur.
J’ai perdu mes cheveux.
J’ai perdu des dents.
Je souffrais, mais la douleur physique n’était rien.
Un jour, il n’était pas là, j’ai perdu du sang. Beaucoup. Je ne sais pas pourquoi, par réflexe, j’ai appelé le SAMU. J’aurais du l’appeler lui en premier. Il voulait être au courant de tout en premier.
Ca n’a pas été le cas ce jour-là.
C’était un réflexe. Ca m’a sauvée. Le médecin du SAMU a fait un signalement. Je suis restée à l’hôpital. Une association de femmes m’a hébergée et protégée.
J’ai perdu mes enfants, ma maison, trente ans de ma vie. Je suis abîmée et blessée. J’ai peur.
Mais je suis loin de lui, et protégée.
Un jour, je serai à nouveau heureuse, je le sais.
Grâce à vous. Grâce à tous ceux qui luttent contre ces violences. »
Ta perdu ta maison tes enfants, mais t’a gagne ta vie qui est bien plusprecieuse que tous le reste….