Être sous emprise a pour la victime de très nombreuses conséquences. Toutes toxiques. Perte d’estime de soi, perte de confiance en soi, isolement social, état psychique confus, anxiété et peurs incontrôlées incontrôlables, somatisations diverses, dépendance économique, sentiment de folie, culpabilité, honte… et cette liste est incomplète.
Le lavage de cerveau, ou décervelage, permanent, provoque une distorsion du raisonnement tout comme une incapacité à rationaliser. La victime devient proprement incapable de savoir ce qui est vrai de ce qui est faux.
Dit plus simplement elle vit malgré elle dans un monde parallèle. Qu’elle n’a pas choisi, de fait. Qu’elle ne connaît pas, dont elle ne comprend ni les règles, ni les intérêts, ni les enjeux, ni le fonctionnement. Elle avance dans le noir, sans guide, sans GPS, sans refuge. Sans équipements en cas d’intempéries, de séismes, de catastrophes.
Elle connaît une chose : la violence. À laquelle s’ajoute une peur permanente. Appelez cette peur angoisse, psychose, névrose, anxiété, irrationalité, …, la question n’est pas le nom qu’on lui donne. La question est ce que cela provoque. Un sentiment de malaise permanent. Un sentiment d’oppression qui va de pair avec ce malaise. Qu’elle le soit ou non, la victime devient claustrophobe. Ses repères spacio-temporels sont détruits. Amenez-là dans un espace parfaitement ouvert, sans limite, lumineux, chaleureux, elle se sent toujours enfermée. Prise au piège.
Tant que l’emprise existe, elle ne connaît qu’une pièce : celle bien étroite que le toxique a créée et construite, dans son cerveau, sa réflexion, son imagination.
La victime y tourne comme un lion en cage, puis comme une souris elle va se tenir dans un coin. Comme dans ces dessins animés pour enfants, où la pauvre souris est seule, dans le noir, collée contre un mur, tremblante, alors que la patte du chat passe déjà, griffes sorties, par ce trou qui était une survie pour l’animal traqué. Alors que cette patte se tend vers elle, prête à l’assommer pour mieux jouer avec elle avant de la tuer.
La victime n’est plus en prise avec la réalité. Elle ne le peut pas.
Ce qu’elle sait, car c’est l’évidence, c’est que son bourreau, ce chat hirsute, toute griffes dehors, ne cessera pas son jeu mortel. Ce qu’elle sait, c’est qu’elle ne peut pas se protéger. Ce qu’elle sait, c’est qu’elle est en souffrance. Ce qu’elle ne sait pas mais qu’elle guette, ce qui l’étouffe, c’est sa capacité à imaginer ce que ce chat va encore essayer et mettre en place pour l’atteindre. Sa faculté à imaginer lui interdit cependant tout espoir. Elle ne voit pas comment en sortir. Elle ne voit qu’un tunnel. Étroit. et à la sortie du tunnel, les griffes de son bourreau qui l’attendent, encore.
©Anne-Laure Buffet
« Tu t’es jetée par la fenêtre quand la lettre est arrivée.
Rien ne naît de jouir pour jouir. Consubstantiation. Un meurtre blanc, pervers. Ensemenceur de néant, qui perce d’éclats froid tous les tissus de soi ; ça t’attrape par ton désir, qu’il ment. Ça t’attrape par l’amour de soi, si fragile, en te faisant jouir beaucoup puis en se retirant pour te regarder demander. Dealer d’affects. Il se fait manque là où tu habitais l’idée. Il te troue le cœur, le cerveau la peau et te brise les os. Il blanchit le verbe comme un dieu sexué, par assertions de joies vides d’idées – Et se désire en toutes choses comme en toi. Et toutes choses se valent, se vident de musique comme toi. Tu deviens le supermarché de sa voix. Ça suce. Rien ne suffira. Il est l’ultime pouvoir, celui qui corrompt la puissance, qui corrompt le livre où travaille l’étant. Ça veut de l’être à en crever, ça suce le sang de la durée. De la durée de l’homme. Ça bouffe le monde dans ta peau. Ça viole l’étoffe de ta Nature et de ses aléas jusqu’à la structure. Quand on le rencontre il n’y a pas vraiment de retour par ce que ça hait la vie par la douceur. La douceur terrifiante d’un jouir qui t’encule le cœur. La détérioration par l’amour. La défloraison des contours d’une chose qu’on n’aurait jamais dû comprendre. Un corbeau s’est posé sur toi et t’a dévoré la foi. Le monde peut-il revenir de ça sans vraie mort. Tu gis dans ton propre corps. Sans preuve. Le pervers est sans preuve. Comme un dieu. Il te marche dedans. Silencieusement. La voisine s’est suicidée. L’hôpital s’est vidé. Tant de salauds réussissent là où l’honnête homme est humilié.
Ça y est. Tu le sais. Le mal existe. Voire une haine. Une haine de soi, sous l’amour.
Un trait commun. Qui coupe le souffle. C’est l’immonde, le trait du pouvoir qui tue au langage, du salop de comptoir à l’Enarque concurrentiel, de la femme sous l’écran des solitudes au requin des finances. Une cour, un réseau. La récréation des enfers.
L’homme joue l’homme joui hors du lit. L’amour du pouvoir, quand il se signifie sous silence. Quand il ne s’énonce pas. Est agit dans nos substances. Une haine de l’existence. Là où tu fermes l’usine, la pensée, le soin, la parole, la rencontre. Une pornographie. La désorganisation du corps. Démembrement. J’ai mal au corps. J’ai mal au monde. Je dis que c’est mourir de voir. Et Je vois une haine, parce que le pas de la neutralité n’existe pas. Au regard de la vie ça n’existe pas. La neutralité est une fin de démocratie. Elle ne veut rien dire. La neutralité se dit d’un silence qui ment, il n’y a pas de secret. Tout ment. La légalité neutre du néo-libéré c’est de la haine sans voix.
Ce grand pas qui nous marche dedans. Cet enchâssement d’investissements qui dévore, toi moi. Dire me retourne l’horreur.Tout le monde savait qu’elle mourait.
Et ceux qui dorment dans la rue. Ça ne veut pas entendre. Ça investi tout. Je ne veux plus réussir. Ça me divise. Ça ne veut plus rien dire. Invisible et financé. L’objet-putain de l’impensé. En défaisance de réel parce qu’elle n’existe pas. Tu m’entends ? Il faut que tu voies !
Elle opère sans corps.
Par définition, en toute choses, sans propriété, par possession !
Pris ensemble, nous en sommes, de ça, devancés, tous déjà, dans le tronc commun de la fosse anthropophage qui corrompt les raisons, toute Parole, tout principe, tout bien, jusqu’à la décomposition des tangibles. Elle ne laisse pas de traces. Elle ne laisse rien, l’imprenable bêtise, la jouisseuse opale, où ironise le mal. Que chacun surveille son con. La loi du marcher qui n’existe rien, qui n’existe pas et sème en toutes choses ce trait d’in-exister. Se marcher dedans jusqu’à la fin de toute pensée. À terre la voix. Une chute encordée au déni. Le libre-arbitre dans l’os, je cours. Tout meurs. Tout ment. C’est la norme qui est folle. Non, pas folle, bête. Bête comme ce qui ne possède pas de propriété animale, bête de fausseté, bête comme un homme mauvais. Radicalement mauvais. Bête comme ce qui jouit du mal. Comme ce qui jouit mal. Bête comme ce qui jouit de dominer et fait de la vie un chantage, une jalousie à l’étalonnement de l’envie. Un monde génital, sans voiles, sans géographie. Une mécanique de l’organe. Sans corps, sans visage, sans métaphore, sans âges.
« Tais-toi » dit le silence !
Refus du sens, des voix, des cordes. »
Extrait de » La dévolumétrisation des ombres »
E. Desprès