LE SYNDROME DE WENDY

wendy-syndrome

« Je suppose que Wendy devait trouver son séjour particulièrement enchanteur, car sa turbulente famille lui donnait fort à faire. Elle n’avait même pas le temps de monter prendre le frais, sinon le soir et encore, avec une chaussette à la main. »
Peter Pan – Sir J.-M. Barrie

Avant toute chose il est indispensable de faire une mise en garde (comme déjà fait sur ce site concernant le pervers narcissique) : qu’il s’agisse du syndrome de Peter Pan, de celui de Wendy, de la fée Clochette, et pourquoi pas de Crochet, du crocodile ou encore de la chienne Nana, il ne s’agit pas de réalités scientifiques, de pathologies reconnues par le DSM V, ou de diagnostics pouvant être posés de manière formelle.

Ce sont des pistes de réflexion fondées sur des analogies avec des figures stéréotypées et parlantes pour chacun, car véhiculées par des mythes et des contes qui, appris dès l’enfance, permettent au lecteur une identification ou une compréhension. Mais comme toute piste, si elle doit être suivie, elle ne se suffit pas à elle-même.

Le succès de ces différents concepts profite de la vague psycho-pop (pop-psychology en américain), abréviation de l’expression psychologie populaire. Ces concepts sont exposés largement dans les médias et les ouvrages grand public.

Le risque majeur étant d’autoriser, avec une lecture rapide et parcellaire, une interprétation, un amalgame et une fausse compréhension d’une situation qui elle, peut être traumatique ou pathologique. En se contentant d’une lecture, et souvent sans consulter par la suite un professionnel, le lecteur ou la lectrice peut se retrouver à différents problèmes, comme l’ignorance de la solution possible, le déni de sa (ses) propres difficultés, la culpabilité accrue en se « reconnaissant » dans un profil stéréotypé…

Quoiqu’il en soit et à défaut d’une reconnaissance médicale (psychiatrique / psychanalytique) il reste indéniable que certains profils sont identifiables ou reconnaissables. Et comme nous avons tous besoin de les nommer, ces appellations ont ce mérite évident : elles permettent de mettre un nom, de visualiser une situation… et de s’encourager ou inviter à consulter afin de pouvoir débloquer une situation complexe et douloureuse.

Ce qui reste toujours incertain, c’est comment, et en combien de temps cette situation peut se débloquer. Et surtout, par quelles étapes et processus il faudra passer pour pouvoir s’en extraire.

Dans un article précédent, j’évoquais le syndrome de Peter Pan. Adulte immature, enfant orgueilleux, jaloux, rêveur, agaçant, cruel, despotique et insouciant, il vit en enfant dans un monde imaginaire, se déchargeant de toute responsabilité, de tout devoir, fuyant les engagements et rendant cruellement l’autre responsable de ses échecs et de ses angoisses.

Bien loin du charmant et plaisantin Peter Pan de Walt Disney, nous voilà face à un homme qui sait amuser et abuser la galerie qu’il se fabrique – pour finir, toujours, par la fuir quand elle se montre trop adulte, trop responsable – mais qui ne peut vivre seul, puisque comme chaque enfant il a besoin de sa maman.

Aussi, pendant obligé du syndrome de Peter Pan, il fallait bien en imaginer un autre pour que cette « maman » prenne vie. Et c’est ainsi qu’on vit naître le syndrome de Wendy.

Le syndrome de Wendy fait référence au même conte, celui de J.M. Barrie, puisque dans cette histoire, la jeune fille passe tout son temps à nettoyer la maison, à prendre soin de ses frères et des « enfants perdus »… Elle coud, brode, chante, lit, berce, console, nourrit, borde… Elle donne tout pour les autres, et c’est sa manière d’être heureuse. Grande sœur en âge (et donc toujours enfant), elle prend le relai de la maman – mère et veille sur les plus jeunes avec dévotion.

Les femmes « atteintes » du syndrome de Wendy se comportent exactement comme la Wendy du conte : elles se consacrent pleinement aux autres, affirment y trouver leur équilibre, en avoir besoin, le vivre comme une nécessité tout autant qu’un plaisir et non un devoir, faisant précéder leurs attentes par ceux des autres, quitte à sacrifier tout ce qui est important pour elle, loisirs et passions.

Ces personnes qui prennent soin des autres spontanément, sans que personne ne les y oblige, pensent qu’être attentionnée représente un moyen d’offrir leur amour. Mieux, ou pire, elles ne le pensent pas, elles en sont convaincues et ne peuvent imaginer la vie – leur vie – autrement.

Aussi, dans leur vie affective, et dans leur relation de couple, elles vont sans s’en rendre compte chercher un homme qui lui aura besoin de cette maman. Pour quelle raison en aura-t-il besoin ? Ce n’est pas la question, en l’instant. Car les causes peuvent être diverses, et parfois multiples. Ce qui est certain est que ce qui va séduire ces Wendy en puissance est le côté à la fois fantasque, léger, un peu perdu un peu paumé, enfant en tout cas, de l’homme qu’elles vont rencontrer.

C’est d’ailleurs pour cela que dans un premier temps ces femmes « Wendy » s’entendent formidablement bien avec des hommes « Peter Pan ». Ils se laissent ainsi porter et dorloter sans avoir rien à faire, pendant que leur conjointe gère toutes les responsabilités, enfants y compris. Quant à elles, elles n’y voient ni malice ni danger. Elles « assument » car elles se disent faites pour cela et heureuses ainsi.

Et jusque là tout pourrait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes, imaginaire. Peter Pan s’envole quand il le souhaite, revient chercher du réconfort, reçoit un baiser, et repart, et Wendy continue de chanter, de border, de cuisiner.

Mais nous ne vivons pas dans un monde imaginaire. Et même Wendy peut grandir. C’est d’ailleurs ce que l’on eut découvrir dans le film Hook, de Steven Spielberg (1991). Wendy y est représentée âgée. Et Peter, qui a fini par quitter le pays imaginaire, s’est marié. Avec Moira, la fille de Wendy. S’il a perdu son enfance, ses rêves et son imaginaire en devant lui-même devenir adulte, il va cependant être rattrapé par Clochette et Crochet.

Il n’est pas question d’analyser plus avant le film et surtout pas d’en tirer un énième syndrome.

Ce dont il est question, c’est bien de la maturité à laquelle peut un jour accéder Wendy. Si l’on peut considérer que tant qu’elle « joue » le rôle de maman, par un attachement insecure qu’elle compense en surinvestissant un rôle dans lequel elle se sacrifie bien plus qu’elle ne s’épanouit, si l’on peut admettre qu’elle n’est pas consciente de s’oublier en permanence et de taire ainsi sa personnalité réelle, nous sommes également dans l’obligation de penser que cette relation peut évoluer, voir se transformer radicalement.

Wendy ne souffre pas de cette position tant qu’aucune posture, aucun rôle ne se modifie.

Mais un risque majeur est qu’un jour, « Wendy » découvre que les personnes dont elle prend soin cessent d’avoir besoin d’elles. Elle se retrouve alors seule. S’en suit une perte de repères, une défiance vis-à-vis des autres et d’elle-même, une baisse de l’estime de soi, un trouble de l’attachement, et une dépendance accrue à celui – ceux qui s’éloignent d’elle. Incapable de les laisser « s’envoler », elle cherche à les retenir, par quelque moyen que ce soit, au risque d’entrer dans un jeu pervers de contrainte – soumission – victimisation – culpabilisation, dont elle ne saura plus sortir.

Et puisque l’on évoque l’aspect pervers, il ne faut pas oublier ces Wendy qui se sont soumises à un enfant-tyran, à un séducteur-manipulateur, à un abus de pouvoir oligarque sans lequel elles pensent ne pouvoir vivre et dont, pendant longtemps, elles ont cru pouvoir se satisfaire.

L’idée de ne plus s’occuper, ou de risquer de ne plus s’occuper de personne, de personne les plonge dans une sorte de terreur, car c’est le seul moyen qu’elles ont trouvé de se rendre utiles, et d’offrir de l’amour. Se sentant devenues inutiles et rejetées, elles se retrouvent dans un schéma déséquilibrant, dysfonctionnel, dans lequel elles n’ont plus de place même si elles vont s’investir d’autant plus pour conserver ce qu’elles pensaient être leur bien-être.

C’est précisément la question de l’équilibre qui est en jeu. L’équilibre entre donner aux autres et donner à soi-même. Ou, plus exactement et pour remettre les choses dans un ordre plus logique et constructif : se donner à soi-même pour donner aux autres.

La première réaction d’une Wendy – ou de toute personne se croyant Wendy, sera la culpabilité, et la honte (il semble que l’on y revienne régulièrement – il semble donc que le pervers narcissique ne soit pas le seul à générer ce type de troubles). Culpabilité de s’être « laissée faire », honte de ne pas avoir dit non, d’avoir tout accepté, d’avoir cru à l’amour, de se sentir soudain l’esclave ou pour le moins la « petite bonne » d’individus subitement ingrats, méprisants, ignorants et dédaigneux.

Mise en abîme.

Wendy n’est plus rien. Et ce qu’elle redoute le plus, le rejet, l’abandon, et la perte d’amour, se matérialisent subitement sans qu’elle ne sache ni que faire ni comment réagit ni comment s’en sortir.

Et si l’on en revient au conte de Peter Pan, faut-il alors imaginer que ce sont les sirènes qui ont séduit l’entourage, ou Lili la Tigresse qui a usé de ses charmes et de sa captivité pour détourner de Wendy des personnalités au caractère de « sauveur » ? Non. L’abandon craint ou vécu par Wendy est un ressenti personnel, intrinsèque, lié à une absence de confiance ou d’estime de soi profondément ancrée et qui se traduit douloureusement lorsque son Peter Pan la quitte ou – pire sans doute – la détruit à force de manipulations.

Toute personne se retrouvant en ce profil de Wendy doit l’entendre, comme dit plus haut, comme une piste de réflexion. Et de travail, sur soi. Wendy n’est pas atteinte d’une « tare ». Il y a une raison à ce comportement, à cette nécessité d’être là pour les autres et de l’être totalement. Si elle souffre de son Peter Pan, la première des choses à faire n’est pas toujours de le fuir. De qui peut-elle alors s’occuper ? Est-elle même prête à s’occuper d’elle-même ?

Il s’agit de passer par une acceptation indispensable. Car, à force de tout donner aux autres, Wendy se sent vide et arrive un moment où ne seront ressentis que de l’insatisfaction, de la frustration et de la tristesse. L’acceptation est celle d’une réalité, et non de ce qui lui semble réel. Elle s’est investit, y a trouvé, pendant un temps, un épanouissement, de quoi combler un manque, un vide, ou un besoin. Et sans doute a t’elle réussi, en partie, puisque celui – ceux qu’elle maternait ont pu grandir. On peut alors voir apparaître un autre syndrome (oui, un autre encore) : celui du « nid vide ». (1) Syndrome qui, celui-ci, met directement en cause la relation mère – enfant d’un point de vue générationnel.

Mais la question qui se pose à Wendy est : qui est-elle, ELLE, réellement ? Qu’a t’elle enfoui au fond d’elle, qu’a t’elle tu, ignoré, caché ? De quoi a t’elle peur, pour ne pas le laisser s’exprimer, ou qui veut-elle être sans savoir comment s’y prendre et par quels chemins passer ?

Il lui sera répondu : « Penses à toi ! Ne t’oublies pas ! Reprends ton espace ! Ose dire non ! ». Il lui sera plus rarement dit, pour commencer : « Chacun a le droit d’avoir son temps, son lieu, son espace, sa réalité. Sa vie. Penser sa vie permet de penser celle des autres, non l’inverse. » Penser à soi n’est pas être égoïste, penser à soi est se donner la possibilité d’être encore une Wendy, mais une Wendy qui se mesure, qui pose des limites, met des freins, impose des règles, et le respect, pour elle-même.

Alors, à la lecture de ces articles résumant bien vite le syndrome de Wendy, il faut aussi savoir mettre de la distance. Il n’y a pas de condamnation à être dans une position maternelle / maternante, tant qu’elle ne devient pas sacrificielle. Tant qu’il n’y a pas perte de soi. Etre mère n’interdit pas d’être femme. Etre femme ne s’oppose pas à être mère.

Tout n’est pas que question d’équilibre. Mais lorsque le déséquilibre prédomine, le système ne tient jamais longtemps. Et c’est à Wendy d’aller chercher cet équilibre, de se l’approprier, pour retrouver ou prendre sa place.

Pour aller plus loin sur le thème de Wendy, il faut aussi s’intéresser au travail de Angelica Liddell, artiste, metteuse en scène, auteure et interprète espagnole. En 2013, elle écrit, met en scène et interprète Tout le ciel au-dessus de la Terre (le syndrome de Wendy).

La majeure partie du travail artistique d’Angélica Liddell tourne autour du thème de l’abandon, de la peur d’être abandonné et de la peine qu’un tel sentiment fait naître. Elle parle de la solitude en terre d’abondance. Pour la psychologie moderne, Peter et Wendy sont devenus l’incarnation de symptômes de plus en plus présents dans les sociétés occidentales. Des adultes font preuve d’immaturité émotionnelle, refusent de passer à l’âge adulte. Mais comment l’humanité peut-elle continuer à vivre dans un monde où les tentatives d’un seul individu pour vivre avec une seule autre personne engendrent des situations douloureuses et pathologique ?

Et si rien ne peut ramener l’heure

De la splendeur dans l’herbe, de l’éclat dans la fleur

Au lieu de pleurer, nous puiserons

Nos forces dans ce qui n’est plus.

 

Ces vers de William Wordsworth ponctuent, tel un leitmotiv, la création d’Angélica Liddell

La matrice de cette mise en scène, explique Angelica Liddell, fut la découverte de ce que l’on appelle, en psychologie, « dilemme (ou syndrome) de Wendy », qui se traduit par une peur pathologique de l’abandon. « Un jour, j’ai compris que ce que je ressentais avait un nom, le « syndrome de Wendy », en référence au personnage féminin dans Peter Pan, se souvient-elle.

Dans mon cas, il est associé à la perte de la jeunesse, quand ce que vous aimez commence à disparaître et vous plonge dans la solitude. » Le résultat, Todo el cielo…, est une forme théâtrale polymorphe et éclatée, qui prend, pendant les deux heures trente du spectacle, diverses incarnations : conte, récit de voyage, valse ou one-woman-show.

(1) Le jour où les enfants s’en vont – Béatrice Copper-Royer, Albin Michel

©Anne-Laure Buffet

 

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3 réflexions sur “LE SYNDROME DE WENDY

  1. Pingback: LE SYNDROME DE LA FÉE CLOCHETTE

  2. Je vais essayer d’être concise. Sans savoir que ce nom de syndrome existait, j’avais discuté avec quelques autres femmes, il y a quelques années, le syndrome que nous appelions SPP dont nous étions atteintes en tant que filles, femmes. j’ai proposé syndrome de Wendy qui nous correspondait bien mieux, car Wendy décide de ne plus être la mère des enfants perdus et retourne vivre auprès de sa propre mère. En effet, ce qui nous caractérisait toutes, était d’avoir été contraintes de prendre le rôle de mère en tant que fille, soit par déficience de notre mère, absence ou désintérêt affectif, et nos étions toutes dans une grande peur de l’abandon, ce qui correspond très justement à votre description. Mais la différence est très claire, je parle bien d’enfants, de jeunes filles, qui du fait de leur rôle soudain de mère, qu’elles prennent à cœur très naturellement, ne peuvent plus, elles, vivre leur vie de fille, de petite fille de jeune femme. C’est une sorte de piège beaucoup plus dramatique à mon sens, que ce qui est décrit ici, car il touche des jeunes femmes dans leur développement normal. Nous avons constaté des symptômes alarmants, et j’ai même envie d’associer le syndrome de l’adolescente Wendy à l’anorexie alarmante, dans ses causes, d’ailleurs, le conflit maternel, la déficience maternel sous couvert de maitrise, comme dans ses conséquences, l’oubli de soi en tant que fille, la maltraitance de son propre corps. Scarification, gestes auto-agressifs, se frapper la tête contre le mur, inlassablement, tant que dure l’angoisse, abandonnisme sévère, lié à une peur terrible de l’abandon, angoisses phénoménale prenant le soir, masque souriant dans la journée qui dissimule l’état de ces femmes, régressions, ou en tout cas désir d’être la petite fille qu’on n’a pas été vis à vis d’une mère défaillante en affection. Désir de mourir, pour finir, qui semble à tout moment en question urgente. J’ai aidé une jeune fille dans cette situation qui avait alors 16 ans. Elle était la fille d’un ami sur le réseau social et j’ai appris que sa fille avais fait une TS au lycée, ça se passe au Québec, les protocoles d’intervention sont différents. Comme elle est sortie de la clinique, j’ai demandé à son père si elle souhaitait que je la contacte, elle a accepté. Elle se plaignait du rejet de ses camarades, brusque et violent, qui justifiait son geste, elle m’a dit qu’on se moquait d’elle parce qu’elle était grosse. Elle ne l’était pas et comme je connaissais sa situation familiale, ses textes sur le réseau social, ses photos, je lui ais fait remarquer qu’elle n’était pas grosse et que tout cela cachait quelque chose de plus grave. Elle devait voir une psychologue le lendemain, et donc mon intervention ‘sauvage’ à distance était lié à deux pistes que je pouvais suivre, connaissant un peu sa situation familiale. Cette fille avait pour mère identitaire, sa grand-mère. Pour simplifier, ici, elle n’avait pas de mère et sa grand-mère l’avait élevée mais était hospitalisée. Elle était donc livrée à un père aimant, mais copain, copain avec elle, et elle devenait littéralement la bonne à tout faire. Nous étions sans doute sur un cas que je connaissais, le syndrome de Wendy, comme j’appelais cela. « Est-ce que tu te scarifies? » En retour, elle m’a envoyé la photo de son bras, un vrai thermomètre gradué du poignet jusqu’à l’épaule. Abandonnisme, scarification, et elle m’a alors parlé de ses angoisses du soir, ses pleurs sans fin, son désir de mourir, le côté sombre de ces angoisses, dont la douleur surpassait celles de la scarification, et le masque souriant qui faisait qu’elle était totalement incomprise par ses camarades. Je luis ai proposé d’être sa maman du soir: Si elle était angoissée, elle pouvait me joindre sur le réseau social, laisser la lumière allumée au fond du couloir, je pouvais lui parler, lui envoyer un gros bisou si elle se sentait mal. Ce soir là cela a fonctionné. Le lendemain la psychologue lui a proposé une famille d’accueil, c’était aussi son désir et je la soutenais dans cette démarche, elle avait besoin d’une maman et retourner à sa place de jeune fille, vivre sa propre vie et non être plongée trop tôt dans sa capacité de mère, de femme, de pilier d’un couple, etc… Je lui avais demandé de tout dire à cette psychologue, du contenu de nos discussions. Sans doute connaissait-elle votre version du syndrome de Wendy. En tout cas cette adolescente a mis encore un certain temps à faire confiance à cette maman de remplacement, elle préférait m’appeler moi. elle a fini par dire à cette maman de remplacement la nature de ses angoisses, et cette femme a aussitôt compris qu’elle devait être celle qui se lève la nuit quand son enfant triste pleure, si on peut le dire ainsi, les scarifications ont cessé, et j’ai vérifié que les grosses angoisses avaient diminué fortement. Par la suite cette jeune fille est partie en camping avec cette maman, en toute confiance, et à la rentrée suivante, dans un nouvel établissement elle s’est faite de nouvelles amis et un petit copain, il reste un fond résiduel d’angoisse « Et si ça revenait » et un fond de tristesse « je n’ai pas de maman » . La mort de sa grand mère en hôpital l’a atteinte profondément nécessairement, mais elle a pu surmonter ce drame, sa grand-mère fait partie d’elle, elle est son attachement primaire, sa mère identitaire, et sa mère de cœur. on sait bien que c’est difficile à vivre. Ma dernière intervention fut de lui dire sa force, j’ai vécu ces situations, notamment à la mort de ma propre grand-mère et je suis confiante, comme je le fais, elle aura à cœur d’aider les autres à son tour, qu’elle est de fait devenue une fille forte et bien dans sa tête. Voilà ma version du syndrome de Wendy, j’insiste vraiment sur le caractère grave et inquiétant de ce syndrome, mais aussi, mon expérience est que par une intervention de terrain, si on sort la jeune femme de son milieu et qu’on offre, bien sûr une solution palliative au manque de mère, et au rôle contraint d’adulte, on peut sortir ces adolescentes de leur symptomatique, et leur faire maîtriser les causes de leur difficulté de vivre. Je ne parle pas de guérison, j’entends bien, pour ma part l’abandonnisme et l’angoisse d’abandon ne m’a jamais quittée dans mes relations avec les hommes et me rend de fait exposée aux pervers narcissiques. Mais je sais ce qu’il se passe et je préviens mon ami que je suis en train de basculer. Cela lui permet de ne pas trop tenir rigueur de mon angoisse, tout en m’assurant de sa fidélité. Cependant, même doucement, la pente est toujours de m’isoler de peur d’être abandonnée. J’ai eu une mère perverse narcissique, j’ai manqué de l’affection la plus élémentaire, étant petite, remplacée par une gymnastique minimaliste et vide de sens. A Quatre ans, j’ai subi un inceste de sa part, et j’ai été perpétuellement dans la surveillance, de peur qu’elle ne recommence sur ma sœur et sur mon frère. De fait, j’ai remplacé l’affection que ma mère ne leur donnait pas, devenant moi-même à la fois leur mère, et la surveillante nécessairement adulte d’une mère que je tentais malgré tout de comprendre, prenant sur moi toutes les culpabilités. Dans ce cadre, ici, je simplifie, mais dans les grandes lignes, on peut vraiment caractériser la situation de l’adolescente Wendy, obligée avant l’heure d’être la maman compétente, certes parce que c’est la caractéristique intrinsèque d’une fille, née fille de par la spécialisation de son cerveau, née maternelle, mais ce n’est pas une raison pour qu’une fille doive devenir la mère du foyer avant l’heure. Chaque étape de la vie d’un enfant a son sens, il y a le temps des câlins, de l’attachement, de l’identification sexuée en connivence avec la maman ou la personne qui s’occupe de l’enfant (pour mon cas, ma grand-mère, moi aussi) , l’adolescence, avec son rythme propre de naissance à la sexualité. Wendy a préféré retourner être la fille de sa maman, et attendre un jour futur, où il serait temps pour devenir maman. Seulement la réalité, c’est que les Wendy on vécu une grosse déficience maternelle, alors que leur mère est leur double identitaire, en principe. Il y a là l’idée aussi de la mère qui n’a pas tenu son enfant, trop léger, ce qui explique d’une manière imagée le trouble fondamental de Wendy, une fille qui naturellement est maternelle, et qui veut bien faire « mieux que sa mère déplorable » « moi j’y arrive », et c’est effectivement ce qui a aussi été décrit. La peur de l’abandon vient tout gâcher. la solution est dans la prise de décision de Wendy: Quitter ce rôle maternel anticipé, et vivre sa vie de petite fille auprès d’une maman référente, en connivence maternelle, mais à sa place de fille, et une mère qui soit efficiente. Les interprétations de type idéologie du genre, je suis totalement contre. La petite fille naît fille de par la spécialisation sexuée structurellement de son cerveau, on doit l’admettre, c’est démontré. Aussi sa tendance évidente est d’exercer dès l’enfance cette capacité particulière. Si la maman est déficiente, la fille prend naturellement sa place sans y penser, sauf que donc, c’est un piège dramatique, qui empêche le développement de la petite fille, de l’adolescente, par des symptômes très violents, l’angoisse fixant l’abandon de la part de la mère, retournée sur soi. Ce sont uniquement des filles, de par le jeu de l’identification troublée à la mère. Si rien n’est fait, on va retrouver un syndrome dans la vie adulte, d’une femme qui n’a pas vécu normalement son enfance (trous et résilience difficile) (régression ou désir de vivre sa petite enfance perdue) (angoisse d’abandon) (abandonnisme) (retour des symptômes de l’adolescence en cas de nouvel abandon) (anorexie) . Il faut d’abord penser à la gestion des causes à défaut de guérison, plus que des symptômes que de toute manière on ne maîtrise pas. L’angoisse est centrale, liée à la déficience maternelle première, donc loin dans l’enfance, parfois, ou dans la vie adulte, inaccessible de toute manière: Qui jouerait en effet ce rôle de mère indéfectible? C’est pour cela qu’il faut s’axer sur ce syndrome à l’adolescence, quand la situation maternelle est encore mobile. Un placement tout à fait volontaire et concerté, dans la famille ou dans une famille d’accueil, une aide maternelle, des conseils, des connaissances à apporter à cette jeune fille c’est ce qui peut fonctionner. A l’âge adulte, le compagnon peut jouer le rôle affectif indéfectible manquant, c’est ce qui arrive souvent, ou encore une femme de la famille, une tante, une grand-mère. Comme c’est une question d’indéfectibilité de d’affection, c’est délicat à proposer à un tiers. Mais cela doit être exposé comme solution possible, parfois la seule à un syndrome grave, qui peut mener à une TS réussie si on se bouche les yeux.

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