« MON » TRÈS CHER PN (3eme courrier)

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J’en ai assez de t’écrire « mon » très cher PN. Donc je ne mets rien. Même pas « bonjour », parce que je ne pense pas « bonjour ». Ce que je pense ? « Merde ».

« Merde », comme tu es capable de me le dire ; de me le dire, jamais de me l’écrire. Môssieu est bien trop prudent. Môssieu est bien trop méfiant. La méchante, la vilaine que je suis pourrait avoir envie d’exhumer cette lettre un jour ou l’autre et de montrer de quelle manière tu t’adresses à elle.

Mais tu sais toujours être pondéré, mesuré, lorsque tu te retrouves dans l’obligation de m’adresser un message. Tu alternes entre élégance de style, séduction, compassion pour ce que je suis – pauvre petite chose à moitié déglinguée, mais heureusement tu es là pour me ramener à la raison – et rappel à la raison. Voyons voyons, calme-toi, comme tu aimes si bien à dire, pense aux enfants…

Oui, les enfants j’y pense, mon p’tit bonhomme. Ça te va très bien, mon p’tit bonhomme. C’est tout ce que tu es, un p’tit bonhomme, et j’ai eu le malheur de te laisser entrer dans ma vie, quand tu as si bien su pousser la porte.

J’y pense, j’y pense constamment. Je te vois, tentant eux aussi de les séduire, de les manipuler, de t’en servir pour mieux faire mal. Tu te moques d’eux. Ce qui t’importe, c’est ce qu’ils peuvent t’apporter. Et ce qu’ils peuvent t’apporter, c’est tenter de me faire encore mal. Tu y arrives, à me faire mal. Simplement parce que c’est à eux que tu fais mal. C’est eux que maintenant tu écrases sous ton talon, mais en y mettant beaucoup de guimauve pour qu’ils ne s’en rendent pas compte, et beaucoup de chewing gum pour qu’ils restent bien collés. Et tu ne vois même pas le mal que tu leur fais, ils sont transparents à tes yeux. Tu n’envisages et calcules que les conséquences pour moi, sur moi.

Tu utilises les mêmes méthodes qu’avec moi. Séduction sourires, cadeaux, belles paroles, fausses promesses jamais tenues. Et tu possèdes une arme redoutable : l’amour inconditionnel qu’un enfant doit porter à son parent. L’incapacité naturelle dans laquelle se trouve un enfant lorsqu’il doit juger son parent.

Toi, le bon père, le père aimant, l’homme respectable, le chef d’entreprise, toi qui refais ta vie, exhibant un chien en laisse – mais qui sait vraiment comment tu le fais vivre, pauvre chien enfermé dans sa cage dès que tu le ramènes chez toi. Oui, toi, trop serré dans tes costumes depuis que tu exploses de prétention, d’arrogance, de mégalomanie et de suffisance. Toi, l’homme à plaindre pour avoir supporté une femme comme moi… Ose te regarder dans une glace. Ose dire qui tu es. Ce que tu fais. Ce que tu mets en place pour mettre à terre ce que tu devrais protéger.

Tu n’oses pas ? Je vais t’y amener. Je vais t’y obliger. J’ai cessé de t’obéir, il y a longtemps. Je ne verrai pas mes enfants être emportés dans la tourmente. Je ne les verrai pas risquer de devenir comme toi. Je ne les verrai pas se transformer en être désincarnés, sans force, sans envie, sans volonté, courbant l’échine pour éviter des coups, ratant leur vie pour ne pas avoir le droit de la vivre.

Dussais-je y laisser mon énergie, je vais me battre. Pour eux.

Car, vois-tu, mon petit bonhomme, l’amour c’est ça. Perdre ses forces, pour que ceux que l’on a mis au monde en aient. Et non aspirer les leurs, pour en faire des ectoplasmes soumis.

Tu as perdu une première fois quand je suis partie. Mais la partie n’est pas terminée. Je crois même qu’elle ne fait que commencer.

Sur ce, je te laisse. Je ne te souhaite rien. Sauf, peut-être, qu’au jour du jugement dernier, la balance tombe en panne. Autrement, elle s’écroulerait sous le poids de ta monstruosité.

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