Si tu peux honnir ton père
En portant ton mépris sur ses gestes et ses mots
Et le critiquer jusqu’à le mettre à terre,
Jusqu’à lui cracher en plein milieu du dos ;
Si tu peux chérir et désirer ta mère
Sans jamais respecter l’image de la femme
Et chercher encore ce coupable adultère
Qu’aurait ton corps avec son âme ;
Si tu peux convoiter sans jamais partager
Et inventer, toujours, sans jamais construire
Si tu peux désirer, jalouser, critiquer,
Et sans honte et sans frein aller jusqu’à détruire ;
Si tu peux être froid et pleurer de fausses larmes
Sur l’épaule de celui qui ne te connaît pas,
Le faisant ton allié, et lui confiant tes armes
Pour qu’il porte à ta place le poids du combat ;
Si tu peux être laid, être sot, être sale,
Être vil, arrogant, fier ou présomptueux,
Si tes pensées t’emportent là où sévit le Mal
Et que tu maudisses ce qui rend l’autre heureux ;
Si tu crois que l’amour n’est rien qu’une illusion,
Un prétexte pour nourrir l’abîme de ton cœur
Et que tu te serves des feux de la passion
Pour tromper amante, amie, ou même sœur ;
Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront selon toi tes esclaves soumis,
Et, ce qui vaut bien moins que les Rois et la Gloire
Tu seras un monstre, mon fils.
©Anne-Laure Buffet
Ce texte est très librement inspiré du célèbre « If » de Sir Rudyard Kipling