UN LOUP À LA MATERNELLE

CECI EST UNE HISTOIRE VRAIE, DANS UNE ÉCOLE PRIMAIRE. LE LIEU ET LES NOMS NE SERONT PAS DONNÉS PAR CONFIDENTIALITÉ.

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– Maman, je ne veux plus aller à l’école…
– Ah bon ? Et pourquoi donc ?
– Y’a une sorcière dans l’école !
– Une sorcière ? Qu’est-ce que tu me racontes ? Il n’y a pas de sorcière dans ton école, il n’y a que des gens très gentils…
– Non ! Je te dis qu’il y a une sorcière ! J’ai même vu sa chambre !
– La chambre de la sorcière, dans ton école ? Tu me racontes une histoire.
– Non ! Je te dis que j’ai vu sa chambre et son lit, et même sa lampe. Je l’ai vue, je l’ai vue, je l’ai vue !!!!

La maman aurait pu ne pas croire sa fille. Mais elle appelle une amie – leurs filles sont dans la même classe. Il y a une sorcière dans l’école… Ou plutôt, sa fille disait vraie.

Le matin même, le directeur fait le tour des classes. Par petits groupes, il emmène les élèves vers les caves de l’école. Une des caves est emplie de gravats, il y a eu des travaux pendant l’été. Sur les gravats, un vieux matelas.

« Regardez, les enfants. Ici, c’est la chambre de la sorcière. Là, il y a son matelas. Et l’ampoule au plafond, c’est l’ampoule qu’elle allume, quand elle attrape l’un d’entre vous, si vous n’êtes pas sages. Alors si vous ne voulez pas finir dans la chambre de la sorcière, il faut vous tenir bien en classe… »

Quelques mois plus tard, fête de l’école. Un tablier a été fait pour les parents… chaque élève a dessiné son portrait. À côté des élèves, le directeur. On le reconnaît… Sous son image, son nom.
Quant à son image… Celle du grand méchant loup.
Sur son ventre : « Je suis le grand méchant loup ». Et sur sa cuisse : « Et j’adore les petits enfants »…

HARCÈLEMENT SCOLAIRE : DES PARENTS PORTENT PLAINTE (7 MAI 2013)

Céline et Bruno l’assurent : leur enfant scolarisée à Bussac-Forêt en Charente-Maritime a été victime « de crachats, de serrage de cou dans la cour de récréation, chose que les instituteurs ont vue une fois. Il est aussi question de cheveux tirés, de menaces, d’insultes, de coups qui font des bleus. »

La plainte , citant notamment la fillette et ses parents, vise  des « agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail pouvant porter atteinte aux droits, à la dignité, à la santé ou à l’avenir professionnel d’autrui ».

La mère espère, avec cette plainte, « qu’on sache la vérité parce que l’académie reconnaît le harcèlement mais nous force à remettre notre fille à l’école avec la petite qui la harcèle ».

Voir l’article complet du Nouvel Obs Éducation, et du Point.fr

CHRISTOPHE LEMAÎTRE, LA REVANCHE DU GRAND BLOND

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CHRISTOPHE LEMAÎTRE, LA REVANCHE DU GRAND BLOND

« Le Nouvel Observateur » consacre un large dossier sur la violence à l’école. 10% des élèves seraient en effet victimes d’insultes ou de coups répétés. S’il n’a jamais subi de violences physiques, le champion d’athlétisme français Christophe Lemaître a bien connu ce harcèlement.

LE HARCÈLEMENT SCOLAIRE M’A DÉTRUIT À PETIT FEU

Alexandre, étudiant de 19 ans, a voulu témoigner d’une époque de sa vie qui l’obsède chaque jour, « bien qu’[il] souhaite par-dessus tout l’oublier ».

Il est question d’un phénomène courant, souvent nié par l’institution : le harcèlement scolaire.


Scène du documentaire « Bully » sur le harcèlement scolaire 

Je veux parler pour que les lecteurs ne voient plus cette violence comme un simple jeu entre enfants.

Mes années en primaire et ma sixième (en collège classé ZEP) se sont très bien passées. Durant mon adolescence, j’ai beaucoup déménagé et c’est en atterrissant dans un nouveau collège (privé) en cinquième que les autres m’ont très vite fait comprendre que j’étais différent : chétif, avec un strabisme et des sujets d’intérêt peu communs – ces choses-là n’avaient pas posé de problème auparavant.

Dès lors se sont enchaînés quotidiennement coups et insultes : j’étais devenu le souffre-douleur, impuissant et presque isolé (j’avais quand même quelques amis), non pas de la classe, mais de l’école toute entière. Les témoins neutres, quant à eux, se contentaient de me dévisager avec pitié.

Les faits

Quand on parle du harcèlement à l’école, on pense souvent à la violence physique, mais pour ma part ça restait surtout verbal. En fait, j’avais un strabisme très voyant et ça a posé un problème dès mon entrée au collège.

Les autres élèves me disaient quotidiennement « Eh, tu me regardes ? » avec pour objectif clair de se moquer, me fixaient du regard en pouffant de rire… Je me souviens, en quatrième, être passé devant un groupe de filles inconnues qui m’ont dévisagé et j’ai pu alors entendre : « Cette tête ! C’est horrible ! ». Uneautre personne m’a dit en face, sérieusement : « Toi… t’es bizarre ! ».

J’ai eu aussi droit aux fausses déclarations d’amour. Ainsi, en cinquième, une fille de ma classe me « harcelait », en me disant qu’elle m’aimait. Elle ne me plaisait pas mais je la croyais vraiment (j’ai toujours été très naïf) et quand je lui expliqué que ce n’était « pas possible » entre nous, elle a répondu :

« Non mais tu voyais pas qu’on se foutait un peu de ta gueule ? »

Moqueries sur le Net

En quatrième et troisième, je n’étais plus « Alexandre », mais j’étais appelé par un surnom (le nom d’un handicapé mental dans une histoire drôle). Personne ne m’appelait par mon nom et ça a été un peu bizarre, quand le harcèlement s’est fini, de redevenir Alexandre au yeux des autres.

M’appeler par ce surnom était quelque chose d’habituel, de quotidien : tout le monde, même les rares élèves qui demeuraient extérieurs aux brimades, et même un professeur une fois, le faisait – parfois sans vouloir être méchant, c’est ça le pire.

Les moqueries se sont poursuivies sur le Net durant ces deux années. Lors d’une excursion scolaire, un harceleur (l’un des « chefs ») m’avait pris en photo. Je l’ai laissé faire (cette dernière allait sûrement être utilisée à mauvais escient mais j’étais naïf, trop pacifiste, et à ce moment je désirais ignorer les brimades).

Résultat : mon portrait s’est retrouvé sur un blog avec comme titre mon surnom, avec des commentaires monstrueux : « Vaut-il mieux en rire ou en pleurer ? » ou « Des personnes comme ça on devrait pas les laisser sortir dans la rue ! »

Le harcèlement restait principalement verbal, mais il m’est arrivé de me faire bousculer ou frapper. En cinquième, trois filles de troisième se moquaient de mon défaut à l’œil. C’était régulier, j’en avais marre, j’ai explosé : suite à une vexation de trop, j’ai craché à la figure de l’une d’entre elles. Je me suis fait alors ruer de coups de poing, jusqu’à ce que je m’excuse ; à la fin, je ne saignais pas mais j’étais très étourdi, fatigué et en pleurs.

Mes parents

Contrairement à d’autres enfants qui restent silencieux, je racontais ce que je subissais à mes parents, mais en restant vague, du genre : « On m’a encore emmerdé aujourd’hui » – j’avais quand même honte de tout ça.

Mes parents sont divorcés : je vivais avec ma mère, qui avait beaucoup à faire, et mon père travaillait (et la première année de brimades, il était à 600 km de chez nous). Il leur était donc difficile de réagir et, comme ils le disaient :

« On ne sait pas quoi faire face à une situation de ce genre. »

Cependant, ma mère est plusieurs fois allée chez le Conseiller principal d’éducation (CPE), et ça n’a servi à rien (j’avoue par ailleurs n’être venu qu’une fois chez lui, mais quel est l’intérêt de se plaindre tous les jours ?). Je reproche une chose à mes parents : de ne pas m’avoir pris au sérieux certaines fois :

« Alexandre, là t’es un peu parano, tu crois pas ? Ils peuvent faire ça pour s’amuser, c’est tout… »

Ils avaient un peu raison : on devient forcément suspicieux envers tout le monde avec des brimades quotidiennes, mais je peux déterminer quand les autres se moquent de moi ou non. Sinon, globalement, ils m’ont assez soutenu.

Les conséquences sur ma vie

Le harcèlement détruit à petit feu : quand, chaque jour, à chaque heure et à chaque minute, on vous dit que vous êtes un moins que rien, vous finissez par le croire.

Ce fut mon cas, et j’ai encore à ce jour un manque de confiance en moi. Durant cette période noire, je ne pensais qu’à ma condition, je ne travaillais quasiment plus à l’école, jusqu’à avoir quelques problèmes avec certains professeurs – mais les bonnes notes étaient au rendez-vous, j’ai toujours eu de grandes facilités à l’école. Je vivais dans un monde imaginaire où j’étais un héros : mes pensées constituaient donc un refuge.

J’ai développé une phobie sociale à cette époque, qui m’a poursuivi, et aujourd’hui encore ces années m’obsèdent, les questions se bousculent dans mon esprit : pourquoi harceler quelqu’un gratuitement ? Mes bourreaux regrettent-ils leurs actes ?

Pourquoi je témoigne

En premier lieu, je veux dénoncer l’indifférence des autorités scolaires. Les professeurs, les pions, le CPE, si prompts à punir pour un bavardage ou une mauvaise note, deviennent étonnamment aveugles ou laxistes lorsqu’il s’agit de violence, un problème objectivement plus grave que ceux énoncés précédemment.

D’autre part, je veux dire l’inexactitude du stéréotype du cancre harceleur et issu des quartiers défavorisés. C’est de cette manière que les médias dépeignent le caïd des cours de récréation. Or, il y a des souffre-douleurs et des bourreaux dans chaque établissement scolaire, qu’il soit huppé ou mal famé.

Pour ma part, les petites terreurs que j’ai côtoyées étaient toutes de bons élèves, et avaient d’ailleurs en horreur les « racailles ». Mes bourreaux assistaient aux messes occasionnelles avec gaité…

UN POEME ET DES DESSINS SUR LE HARCÈLEMENT À L’ÉCOLE

Même si la vidéo est en anglais, pour la beauté des dessins et la poésie qui s’en dégage.

Des dizaines d’illustrateurs évoquent le harcèlement à l’école.

Le harcèlement scolaire est un phénomène encore peu connu et dénoncé en France – au contraire des pays anglo-saxons par exemple, ou le « bullying » est l’objet de nombreuses campagnes de prévention. Pourtant, 11,7% des élèves des écoles élémentaires françaises subissent des violences physiques ou morales chaque jour.

Le harcèlement a lieu au sein d’un triangle : la victime, le harceleur et les spectateurs, qui de par leur indifférence participent au harcèlement. Ces violences ont des conséquences graves, comme la perte de confiance en soi, le décrochage scolaire, la désocialisation, la dépression, pouvant aller jusqu’aux penchants suicidaires.