Je t’appelais Maman chérie

« Je t’appelais Maman chérie » est une fiction sous forme épistolaire, retraçant la relation d’une fille à sa mère. Entre amour et emprise, manipulation et culpabilité, Emma essaie de grandir et d’affronter sa réalité. 

Maman que j’aime

Je regarde tous les jours dans la boîte aux lettres pour voir si tu as écris et aujourd’hui c’est une très jolie journée parce que tu m’as envoyé une jolie carte avec Titi. Il me fait beaucoup rire parce qu’il fait tout le temps des farces et j’aime beaucoup aussi faire des farces alors papi a dit qu’il va m’appeler Titi.

Mamie va bien et elle est gentille avec moi, et papi aussi. Et comme tu me l’as dit je fais ce que je peux pour les aider et apprendre à m’occuper d’une maison. Mais là les vacances avec eux maintenant ça dure un peu longtemps, et toi tu me manques beaucoup et j’aimerai te faire des gros calins quand on va se voir.

Je dis rien parce que tu m’as dit que c’est eux qui veulent que je passe le mois de juillet chez eux. Ca me fait plaisir mais sans te voir c’est quand même long, parfois je sais pas quoi faire. Et alors je me dis que tu dois être triste aussi si tu es obligée de m’envoyer chez papi et mamie. Je comprends pas pourquoi tu es obligée. Mais tu me dis qu’il faut pas te dire non alors tu dois pas dire non aussi à tes parents, je crois que c’est ça.

L’année prochaine j’espère que tu pourras venir me chercher plus vite.

Je sais que tu es là dans cinq jours.

Je te fais des gros gros bisous ma maman chérie. Emma

MORT VIVANTE – EXTRAIT – À PARAÎTRE

Mort vivante est une fiction. La vie d’une femme sous l’emprise d’une personnalité toxique, victime de manipulation, de harcèlement, de diffamation. 
Tous les faits de cette fiction sont réels. 
Toute ressemblance avec des personnages existant ou ayant existé n’est pas fortuite. 

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Une fois de plus, tu avais un cadeau pour moi. Pour quelle raison ? Une réflexion la veille sur le dîner ? Une bouderie de plus ; tu boudes si souvent, t’enfermant dans ta chambre et n’en ressortant que bien plus tard, la mine défaite et le visage fermé. Ce jour-là, je n’ai pas voulu de ton cadeau. Tu as insisté. J’ai persisté dans mon refus. Tu as serré les dents. Tu t’es mis à rougir.
Et subitement, tu as changé de visage. Caméléon du sentiment – si seulement tu en avais ! – tu devenais implorant. Il fallait que je prenne ce cadeau. Il fallait que je te pardonne, une fois de plus. Il fallait que je me taise, encore. Les yeux qui s’affaissent, la bouche qui se tord et semble fondre telle celle d’un visage de cire, coulant lentement vers le menton. Tu déglutis, tu avales de travers. Ta pomme d’Adam joue au yoyo, au rythme de ta salivation. Tu ne comprends pas. Tu ne me comprends pas. Je reste là, assise face à toi, le cadeau posé entre nous, sans bouger. Le cadeau, objet du scandale, objet du déni, objet de l’objet.
Je ne t’obéis plus.

Tu te défais un peu plus. Tu sembles être calme. Je vois tes épaules qui tremblent, oscillation électrique, colérique, que tu ne peux ni contrôler ni dissimuler.

« T’en as rien à foutre de moi. Tout ce qui t’intéresse, c’est mon fric ! »

Le mot est lâché. Tu sembles stupéfait de l’avoir prononcé. Le fric. Ce que tu dépenses pour moi, dans ta si grande bonté. Et moi qui ne suis plus reconnaissante. Qui ne m’agenouille plus, qui ne me prosterne plus devant toi. Le piédestal s’est effrité, ta statue toute puissante s’écroule lentement. Pour la première fois, tu me jettes à la figure ce qui t’insupporte, et ta plus grande peur… qu’on te prenne ton argent. Qu’on te vole, qu’on te spolie, qu’on t’extorque… Combien de synonymes connais-tu ? De combien useras-tu par la suite ? Pas une fois, depuis ce jour, il n’y eut de disputes sans que l’argent soit évoqué. Ton argent. Ce que je te dois. Ce pour quoi j’ai à être reconnaissante. Ce que tu me donnes.

Beaucoup pleurent de perdre l’amour.

Toi, tu pleures sur ton fric.

©Anne-Laure Buffet