Crédit photo Laurent Delfraissy
Mesdames, Messieurs les Avocats,
Il n’est pas question ici de vous infliger une peine, un blâme ou une sanction. Ni de critiquer votre profession, votre serment et vos engagements. Ni, de plus, de remettre en cause votre déontologie. Ni enfin, de considérer que vous ne savez écouter ou entendre la souffrance lorsqu’elle vous parvient.
Il est cependant question de vos clients. D’une partie de ceux-ci, car, Dieu soit loué, tous ne sont pas dans une telle situation de violence, de souffrance, d’isolement et d’incompréhension. Tous ne viennent pas chercher, outre vos qualifications juridiques et votre art oratoire, un soutien, une oreille compréhensive, et des solutions pour se protéger.
Cette femme qui vient vous voir pour la première fois, n’arrivant pas à trouver les mots pour vous dire pourquoi elle veut divorcer… Cet homme qui demande des conseils, sentant un danger pour ses enfants… Cette femme encore qui n’ose parler, qui retient ses larmes, dont vous ne voyez les yeux que derrière un voile embué, qui tremble si vous demandez plus de renseignements, qui tremble un peu plus si vous avancez des arguments contre son conjoint… Cet homme, un autre, qui espère un divorce consensuel, et que surtout, surtout, rien ne s’ébruite, et surtout pas ce qu’il vit…
Tous ces clients qui arrivent avec leurs silences, leurs non-dits, leurs peurs. Qui ne savent mettre des mots sur ce qu’ils vivent. Sur leur fatigue. Leur accablement. Leurs inquiétudes et leurs angoisses.
Aidez-moi… Que craignez-vous ? Tout. Votre mari est violent ? Physiquement violent ? Non, mais j’ai peur de lui. Peur ? De quoi avez-vous peur ? Je ne sais pas. J’ai peur.
Je ne sais pas, j’ai peur… Ce malaise que vos nouveaux clients ne savent expliquer, cette athmosphère pesante, destructrice, qui les empêche d’être eux-même, d’être « présent » au rendez-vous… Vous voyez des dossiers qui arrivent, vous entendez une fois de plus un client demander le divorce, pour mettez en avant l’intérêt des enfants … oui, mais le père, la mère, est différent(e)… Différent ? Différent comment ? Différent ne veut pas dire dangereux… Et pourtant.
Et pourtant cette différence est dangereuse. Fondamentalement dangereuse. Car destructrice. À court et à long terme. Pour votre client(e) et pour les enfants.
L’emprise ne se verbalise pas, et semble inexplicable. Certains de vos client(e)s diront qu’ils sont victimes, qu’ils connaissent des moments de violence. La plupart vont le taire. Par peur. Par culpabilité, par honte. Par incapacité à imaginer que le pire reste à venir. Car le bourreau ne lâchera pas votre client(e) ainsi. Ce sont des années de procédure qui commencent, pendant lesquelles la diffamation, les accusations mensongères, le silence fait exprès pour nuire, les attestations en tout genre, calomnieuses, les enquêtes médico psy, les enquêtes sociales, les médiations, les demandes d’EMJ, d’AEMO… vont se succéder.
Votre client(e) arrive avec son bagage de violence psychologique, qu’il ou elle subit depuis des années. Avec parfois de la violence physique. Avec un isolement social et familial contraint, isolement qui sera présenté par la partie adverse comme une preuve de sa pathologie, voir de sa folie. Avec des troubles somatiques importants. Une dépression, un burn out, une incapacité à chercher un emploi ou à se réinsérer dans le monde du travail, par perte complète de repères et de confiance en soi. Avec une violence économique, le bourreau n’ayant de cesse que de vouloir ruiner la vie, la réputation, les conditions matérielles de votre client(e).
Le bourreau est un psychopathe qui ne finit pas son travail par un meurtre visible. Mais il y a bien meurtre. meurtre psychique et social.
Mesdames, Messieurs les Avocats,
lorsqu’un(e) nouveau client(e) entre dans votre cabinet, lorsqu’il (elle) y cherche refuge et secours, lorsque les mots deviennent impossibles à dire, lorsque l’épuisement domine… Envisagez cette destruction. Envisagez ses suites, afin de pouvoir conseiller et défendre au mieux. Les tenants et les aboutissants psychologiques, vous ne les connaissez peut-être pas. La notion d’emprise ne vous est pas toujours familière.
Apprenez. Apprenez car chaque jour il nous faut apprendre encore.
Apprenez car vous n’êtes pas au bout des surprises que la partie adverse vous réserve.
Ne voyez pas en l’emprise une simple torture à laquelle un divorce peut mettre fin. Comprenez que cette construction-déconstructiondure et perdure et s’installe, vampirisant celui ou celle qui se présente un matin chez vous, apeuré, abîmé, effrayé à l’idée d’être, d’exister, de devoir se battre.
Mesdames et Messieurs les Avocats, les victimes ont assez souffert. Les victimes ont suffisamment peur. Les victimes ont trop vécu le rejet et l’incompréhension. En vous engageant auprès de ces victimes, c’est auprès d’humains que vous vous engagez, pour contribuer à leur rendre leur vie. Pour elles, remontez les manches de vos robes, sortez des dossiers et des prétoires. En détective, menez l’enquête. En conseiller, écoutez les, répondez-leur, comprenez qu’ils ou elles puissent se montrer envahissant(e), ce qu’ils ne veulent pas être, ce qu’ils ne peuvent s’empêcher d’être, par peur d’être détruit(e), encore.
Vous commencez vous aussi un vrai combat. Et votre client(e) a besoin de vous en allié.
©Anne-Laure Buffet
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N’oublions pas la violence psychologique au travail. j’en ai été victime et ne suis toujours pas remise!!!!
N’oublions pas également la violence psychologique sur le lieu de travail. J’en ai été victime au travail et je n’en suis toujours pas remise!!!
c’est exactement sa !
Perdu….après 20 ans, ne sachant que faire resté es faire du mal au enfant part nos engueulade partir c’est fait depuis 3 jours en laissant le petit sachant pas trop quoi faire aller voir un avocat j’en ai vue deux 100€ mais aucune solution à part « lançons la procédure de divorce » mais que faire aucune solutions d’accord de droit de séparation sans papier alors je part seul pour redonner une bouffer d’oxygène a mon fils je suis en tord es de partir du domicile je me mes en faute mais je m’en fou la situations es trop dure mon fils je t’aime ma
Femme je t’aime mais me sachant perdu ne sachant plus quoi faire me voyant pas dans 20ans je préfère partir es réfléchir à notre devenir
Tu pourra te servir de sa ,cela m’en incombe peut ! Ma joie de vivre reste Bathiste es Morgane
Je vous aime mes enfants
Es je pense a toi
Ne nous déchirons pas nos enfant ne mérite pas sa le dialogue reste la meilleure armes restons digne pour nos enfants es notre amour vécue
Très juste, notamment la suite qui ne cesse pas avec la séparation ou poursuit en boomerang : somatisation, difficulté de réinsertion dans un processus de vie normale qui peut donner à penser que la pathologie est du côté de la « victime ».
Un des effets pervers engendré par la personnalité toxique, retourner une situation jusqu’au brouillage, à l’effacement d’une personnalité au point de la saturer et la diluer.
Comme vous l’expliquez meurtre psychique qui engendre une destucturation et décomposition de l’être.