LE BRUIT EST SOUVENT TROMPEUR

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Les victimes de violences psychologiques sont fragilisées. Elles n’ont plus de « radar », plus de limites ; elles sont incapables de se distancier de la réalité, prêtes à croire le premier venu, ou au contraire à fuir toute main tendue, aussi bienveillante soit elle.
Elles ne parlent pas – pourquoi le feraient-elles, alors que personne ne les croit ?
Elles ne se plaignent pas – se plaindre de quoi, alors qu’elles sont convaincues d’avoir tort, au moins en partie ?
Elles ne gémissent pas, n’accusent personne, se font discrètes, se tiennent en retrait, en silence. Elles ne pavoisent pas.
Quand elles s’expriment, c’est souvent confusément, cherchant leurs mots, leurs idées, le fil conducteur, qu’elles n’arrivent ni à tenir ni à suivre.
Elles n’ont pas de hargne, pas de colère, pas de revanche.

Il faut du temps pour que la colère s’exprime. Une colère légitime, qui est bien plus un cri, un hurlement, et même, pardon de la comparaison, le cri d’une mère en train d’accoucher, de mettre au monde un être destiné à vivre et grandir, et si possible, librement. Cet être que les victimes – hommes ou femmes – mettent au monde, c’est elles-mêmes. Elles expulsent le meilleur d’elles-même, trop longtemps en gestation, interdit de respirer par la volonté d’un autre.

Les victimes dissimulent leur souffrance. Elles ne la trouvent même pas injuste. Elles ne trouvent pas leur situation injuste. Elles l’acceptent, jusqu’au jour où une vraie prise de conscience leur permet de mettre en place un changement. Et ce changement prend du temps.

En revanche, certaines personnes se qualifient de victimes. Elles le font haut et fort. Elles crient, hurlent et gémissent, et tel un dramaturge de film muet, portent leur main sur le front, se déforment le visage dans des grimaces à faire cauchemarder tous les enfants du voisinage, se désespèrent de leurs « malheurs », invectivent tant qu’elles peuvent, dénoncent sans rien redouter et nommément celui ou celle qu’elles accusent.
C’est une inversion, destinée à attirer le regard, la complaisance et la compassion.
C’est un jeu dont les manipulateurs savent se servir avec brio.
Pendant qu’ils semblent mourir dans des souffrances aussi atroces que bruyantes, ils étouffent avec leur vacarme le peu de bruit que la VRAIE victime essaie de faire… Imaginez, pour faire une comparaison, une brise de fin de journée qui tenterait de recouvrir le fracas d’une tempête.

A ce jeu cruel, c’est bien souvent la FAUSSE victime qui gagne.
Et si elle se retrouve prise le « doigt dans le pot de confiture », si sa manipulation est décelée, elle fait encore plus de bruit, ne redoutant ni Dieu ni diable, mais simplement de perdre l’aura qu’elle s’était créée de toute pièce. Comme on imagine un enfant capricieux, orgueilleux et colérique, vexé d’avoir été surpris pendant sa bêtise, et qui cherche à se dédouaner en pleurant, gesticulant et niant, ces FAUSSES VICTIMES ne tardent pas, dès qu’elles sont dévoilées, à tenter toute manoeuvre, bruyante, spectaculaire, pour retourner la situation. Et projeter sur la victime ce qu’elles sont, elles.

La vie n’est pas un spectacle. Nous en sommes les acteurs, pas les comédiens.
Comme disait une marionnette dans une célèbre émission : « Méfiez-vous des contrefaçons ».
Méfiez-vous de ceux qui, ici ou là, sur le net ou ailleurs, crieraient au scandale, drapés dans leur prétendue bonne foi, n’hésitant pas à nommer le responsable de leurs maux, et à lui faire porter un sac rempli d’accusations mensongères et farfelues – mais ô combien cruelles. Leur bruit inquiète et fait fuir. Elles restent seules, ou avec la pitié et l’amitié de ceux qui veulent les croire. Elles continuent de courir. Et si personne ne fait rien, la VRAIE victime, celle qui est vraiment en souffrance, le reste, et s’y enfonce encore plus.
Silencieusement. Sans laisser de trace.
Ce qu’elle vit est invisible.
Et le manipulateur ne cesse de s’en servir.

©Anne-Laure Buffet

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