UN TRAVAIL D’ARCHIVISTE

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« Comment prouver la violence ? Comment prouver le harcèlement ? Depuis que nous sommes séparés, il ne répond à rien, il ne dit rien… je ne sais plus quoi faire. »

Une procédure, que ce soit une procédure de divorce, ou autre, face à une personnalité toxique, est toujours très complexe. Elle implique pour la victime de prendre conscience de ce qui va lui peser terriblement : les délais de la Justice. Si la victime est dans l’urgence de vois son dossier traité, la Justice n’a pas la même urgence ni le même intérêt. La Justice prend son temps, parce qu’elle est débordée, parce qu’elle a trop d’affaires à régler. Parce que les toxiques jouent sur les délais, obtiennent des reports, fournissent leurs pièces au dernier moment, invoquent un incident, demandent des expertises, des contre expertises, des médiations. Parce qu’ils font traîner, et que la Justice se doit de respecter toutes les demandes. Même celles qui sont iniques pour la victime. Car la Justice se veut juste. Et se vouloir juste lui ordonne d’entendre complètement les deux parties.

Aussi, pendant toute la durée de la procédure, la victime va être conditionnée par ces moments où l’avocat ne répond pas ou plus, ces moments où elle attend, ces moments où les reports d’audience détruisent les espoirs. Les victimes constituent un dossier, le trouve bien léger, car elles ne savent quoi donner comme pièces, se concentrent sur tout ce qu’elles ne peuvent pas fournir, ont sous les yeux tout ce qui leur est reproché, et n’arrivent pas à distinguer l’essentiel, l’utile et le superficiel.

C’est pour cette raison que bon nombre de victimes ne prennent pas le temps de conserver les messages reçus, ou encore d’en envoyer. Par peur des réponses qu’elles auront, ou n’auront pas. Parce qu’on leur a dit : « fuyez, et ne cherchez aucun contact ». Par honte et culpabilité, se sentant encore coupables de ce qu’elles ne sont pas, n’ont pas dit, n’ont pas fait. Elles pensent : « encore un message que je vais envoyer, parce qu’il faut prendre une décision pour les enfants, parce qu’il faut que je sache ce qui se passe. Et encore une fois, j’aurai des insultes, mais rien de concret…. s’il me répond. ».
Or, rien de concret est un élément important. Lorsqu’il se répète, il sert à démontrer la mauvaise foi ou la volonté de nuire de la personnalité toxique. Or, encore, le silence est tout autant un élément probant de la violence psychologique. Lorsqu’il s’agit de prendre une décision, par exemple concernant les enfants, pour l’école, pour un médecin, pour l’organisation des vacances… et que la victime n’obtient jamais de réponse, là encore, ce peut être utilisé en justice pour montrer la volonté de nuire en laissant dans le flou et l’interrogation.

Il ne s’agit pas d’un élément, d’un fait qui se produit une seule fois. Il s’agit de leur répétition. Il s’agit encore de tout conserver, les messages envoyés, et ceux reçus. Il s’agit de faire un travail de secrétariat. Un travail long, pesant, psychologiquement couteux. Car il implique que la victime se replonge régulièrement dans ce qu’elle a déjà entendu, lu, et reçu. Il s’agit encore de se faire, à ce moment-là, accompagner, pour acquérir des réflexes. Pour structurer des messages brefs, concis, sans justification, allant droit au but, demandant une réponse tout aussi claire et précise. Il s’agit de fonctionner par dossiers. C’est terrible pour la victime ; sa vie déjà détruite se retrouve classée et archivée, prête à être à nouveau scrutée, dépouillée par des avocats, pour en sortir des éléments probants. Mais c’est essentiel.

Une telle procédure devient une occupation à – quasi – temps plein. C’est un nouvel enfermement pour la victime. C’est celui qui va lui rendre sa liberté. Pour sortir de la violence, il faut malheureusement se faire violence, et en supporter encore. C’est un bouclier très lourd à porter, mais bien réel.

Il ne faut pas oublier que la personnalité toxique, de son côté, agit sans aucun scrupule. Que tout ce qui lui est dit, lui est écrit, elle le garde. Elle le classe. Et elle compte bien s’en resservir un jour, hors contexte.

Les victimes qui osent demander de l’aide pour apprendre à constituer ce dossier qui pourra les aider, les victimes qui apprennent à affronter tant la cruauté de la personnalité toxique que leurs peurs, afin d’accumuler les éléments nécessaires pour leur procédure, les victimes qui réussissent à supporter les délais de procédure pour en faire une arme de défense contre la personnalité toxique ont bien plus de chance d’être enfin entendues.

 

 

5 réflexions sur “UN TRAVAIL D’ARCHIVISTE

  1. on se demande même pourquoi on se présente à une audience ! juste pour qu’ils voient notre figure ? j’ai ressenti la même chose aussi

  2. Je n’ai pas continué non plus pour le jugement JAF, pour 2 raisons: sous aide juridictionnelle, l’avocate était totalement inefficace pour raison de gros sous « Madame, il est hors de question que je travaille pour rien » (véridique) et la deuxième raison, pour ne pas perturber encore plus les enfants, comme vous dites, tant que les enfants vont bien, enfin pas trop mal je dirais…. leur majorité arrive, donc, ce seront les juges en quelque sorte.
    Il reste encore 2 procédures en cours, mais avec une nouvelle avocate cette fois ci. Quelle différence !

  3. J ai déjà laissé un commentaire sur le même sujet, mais il faut signaler que cet archivage demande aussi des moyens financiers. Les mails ou textos, pour etre des pièces recevables devant le juge, doivent être contrôlés par un huissier. J évite de vous donner les tarifs de l huissier..il en va de la justice comme de la médecine. Plusieurs vitesses. Pour ceux qui ont les moyens financiers, pourquoi pas… Pour les autres, c est l aide juridictionnelles et des avocats qui courent après leur argent et qui ne sont pas particulièrement motivés devant la complexité des dossiers. J ai tenté de passer outre, fournissant au juge la copie des sms insultants, pas des petites insultes mais de véritables atteintes à la dignité humaine, propos qui sont soi disant sous le coup de lois. Je me suis dit naïvement, après tout un juge sait lire il me semble…Ce juge a conclu à des  » relations excecrables » …non seulement je n ai rien obtenu ( ma fille souhaitait cesser la garde alternée ) mais le propos  » conflit parental » utilisé par mon ex mari s est retourné contre moi. Les conclusions ont utilisé ce terme d une façon ambiguë. De telle sorte que mon ex mari s est senti victorieux. Parfois je me dis que ce n est pas tant contre la violence que l on se bat, mais contre les rouages d une justice fermée et sourde. Lorsque vous vous présentez à une audience, que les avocats font leurs plaidoiries respectives, que votre vie intime est déballée sans ménagement, que vous êtes présent, en face de ce juge, et qu a aucun moment il ne vous adresse la parole, on se sent totalement humilié et nié. Vous n avez rien a dire, vous êtes un dossier et votre vie est dans les mains des avocats…

  4. Je continue: d’un autre côté, la longueur peut être favorable, dans le sens où on surpasse l’émotion pour peu à peu, mieux réfléchir et arriver à être objectif.
    Pour le travail d’archives, ouf, c’est vrai !

  5. Bien d’accord. Il ne dit rien dans ses conclusions à part nier sans apporter le moindre élément. Le piège dans lequel il ne faut tomber est de s’efforcer à répondre et chercher les preuves encore et encore alors que lui , rien ! que des mots et des adjectifs incisifs visant à influencer le tribunal., et autrement dit « tourner en rond »
    Mon avocate vient de me dire : cela suffit, nous ne devons plus argumenter, tout est dit.
    Il sait faire durer la procédure , exemple : audience de mai reportée au 2 juillet. Il ne donne pas de conclusion, résultat : injonction de conclure au 17 septembre. Voilà, encore 4 mois de gagnés pour lui. (c’est sa deuxième injonction de conclure, ce qui nous amènera à 2 années de procédure bientôt)

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